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[Enquête] Repenser le rôle de l’entreprise dans la société

Grande consultation citoyenne pour repenser le rôle de l’entreprise dans la société.

La civic Tech Cap Collectif et The NextGen Enterprise Summit publient les résultats d’une grande consultation citoyenne lancée le 15 septembre dernier par 50 dirigeants européens parmi lesquels :  
- Isabelle Kocher (Simplon Fondation),
- Pascal Demurger (MAIF),
- Henriette Dræbye Rosenquist (Pfizer France),
- Alain Roumilhac (Manpower),
- Luc Bretones (Purpose For Good),
- Cyril Lage (Cap Collectif),
- Philippe Pinault (Holaspirit),
-  Pierre Sinodinos (Aneo).

En s’appuyant sur plus de 1100 réponses, Cap Collectif a pu analyser les attentes prioritaires des citoyens sur trois grands enjeux : le rapport de l’entreprise à la société et ses impacts, les relations hiérarchiques au travail et l'engagement réel des collaborateurs vis-à-vis du projet d’entreprise et l’épanouissement et le bien être des collaborateurs au travail.

Les résultats de cette consultation ont été dévoilés par Thibaut Dernoncourt, le Directeur Conseil de Cap Collectif à travers leBaromètre des attentes citoyennes pour l’entreprise de demain” remis au Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance Bruno Le Maire et à Olivia Grégoire, Secrétaire d’État en charge de l’Économie Sociale, Solidaire et Responsable, lors du NextGen Enterprise Summit, les 26 et 27 novembre 2020, événement phare consacré aux nouvelles formes d’organisations et de management.

Comment dépasser la quête de profit à court terme ?
Comment réengager les salariés et les associer au projet d'entreprise ? Comment contribuer à l’épanouissement et au bien-être des salariés ?
Ces questions ont été posées lors de cette grande consultation en ligne du 15 septembre au 23 octobre 2020. Deux modalités de participation étaient disponibles, l’accès à une plateforme de débat contenant 50 propositions initiales de dirigeants pour permettre aux citoyens de voter, d’argumenter et le cas échéant de formuler des contre-propositions et un questionnaire en ligne promu sur les réseaux sociaux.

Les nombreuses réponses qui ont dépassé les attentes des organisateurs de la consultation, constituent selon les dirigeants participants “d’excellents enseignements” et “une manière concrète d’éclairer leurs réflexions à travers les nombreux points de vue exprimés.” 


Principaux enseignements de ce Baromètre

I - La fin d’une relation infantilisante de contrôle ?
Derrière l’unanimité autour d’un mode de travail plus horizontal et collaboratif, s’exprime une demande massive des salariés d’être considérés comme responsables. Le reporting permanent est perçu comme la manifestation exaspérante de ce manque de confiance qui produit une surveillance de tous les instants et une infantilisation des rapports humains au travail. Le modèle tayloriste est reconnu comme obsolète et sclérosant, mais dans les faits et pratiques quotidiennes d’une majorité d’entreprises, il continue d’être la norme et un réflexe systématique.
C’est à la fois la proposition la plus votée et controversée de la consultation ("Éviter de contrôler ses collaborateurs et d’établir des règles sur des points insignifiants et infantilisants” de Jean-François Zobrist) qui revient le plus souvent dans les contributions des participants.
Pour Jeanne, participante à la consultation, “Les salariés ont l'impression de ne plus exercer leur métier mais passer leur temps à documenter ou justifier chacune de leurs actions.”
Pour Alain, autre participant, “L’apparition de règlements basés sur une sécurité onéreuse et souvent excessive protège d'abord la hiérarchie et complexifie la tâche des actifs.” 

II - L’environnement, une priorité réaffirmée … place aux actes
À la première question “Pour vous, que devraient faire les entreprises en priorité aujourd'hui ?” : “S’engager avant tout dans la transition écologique” est la réponse la plus soutenue (près d’un quart des réponses) avant le développement de la formation ou encore les revalorisations salariales.
À la seconde question, “Que devraient faire les entreprises pour parvenir à concilier profit et impact positif sur la société ?”, 39 % des répondant(e)s souhaitent que les entreprises se fixent des objectifs chiffrés qui les engagent en matière de protection de l’environnement et d’impact social de leurs activités.
La question environnementale est une préoccupation croissante dans l’opinion publique et le champ politique. Elle devient même la priorité pour une partie de la population comme l’ont montré cet été les élections municipales. Cette consultation vient démontrer que l’entreprise n’échappe pas à ce qui est devenue une exigence bien plus qu’une tendance. Isabelle Kocher dans sa proposition de décarboner son modèle d’affaire, (la 4ème la plus soutenue la consultation), le prédit “ Seules les entreprises qui s’attacheront à réparer les fractures de notre monde connaîtront une croissance à long terme”. 

III - Clients et collaborateurs, désormais côte à côte pour faire avancer les entreprises
Alors qu’on a longtemps utilisé la règle du “client est roi” pour justifier nombre de transformations et réorganisations internes aux entreprises, parfois à marche forcée contre l’avis et les intérêts des salariés, cette étude montre plutôt une convergence des attentes des salariés et des clients. Ce front commun exerce aujourd’hui une pression d’autant plus forte sur les dirigeants et actionnaires.


Les controverses

- La raison d’être : en quête d’impact et de sincérité
Conséquence directe de la loi PACTE, en écho à l’importance majeure des enjeux environnementaux rappelée ci-dessus, la raison d’être des entreprises a été au cœur des débats. Cette notion se popularise et un nombre croissant d’entreprises se prête à l’exercice. Revers de la médaille, une majorité de participants, sans rejeter l’intérêt de la raison d’être, bien au contraire, tendent à mettre en garde contre une dérive purement cosmétique de l’exercice, ou pour atténuer le propos d’une tendance à déconnecter l’exercice de son objectif initial, à savoir le rassemblement de toutes les parties prenantes d’une entreprise autour d’un modèle économique soutenable, responsable et fédérateur.
Martin Richer, président et fondateur de Management et RSE, nous alerte : “Beaucoup parmi les 150 raisons d'être (RE) publiées en France ne répondent pas à la question du pourquoi (contribution aux enjeux) et ne se traduisent pas par un changement de comportement”
Colin, un autre participant, marque son scepticisme : “Confier la définition de sa raison d'être à une agence de pub, c'est pour faire de la pub (...) la plupart des collaborateurs savent cela.”
Lise, autre contributrice, se retrouve davantage dans une notion plus ancienne, “Je préfère les valeurs à la "Raison d’être". En effet, les valeurs sont une notion concrète qui donnent un état d'esprit cohérent à tous les salariés.”

- La participation : une demande de recentrage sur le dialogue social et la stratégie ?
Le terme de participation dans le monde de l’entreprise comprend un double sens. Il est lié aux dispositifs financiers d’intéressement et de partages de bénéfices avec les salariés. Les participants l’ont rappelé avec force : à la question “ Comment les entreprises peuvent-elles mieux partager les richesses qu’elles génèrent ?” 55,7% d’entre eux invitent à généraliser les dispositifs d’intéressement et de participation dans l'objectif de redistribuer des bénéfices aux salariés.
Plus surprenant est leur réponse sur la manière dont ils pensent pouvoir participer à la vie de leur entreprise et être impliqués dans son fonctionnement. 37,6% d’entre eux privilégient un dialogue social ouvert et transparent à tous les niveaux de l'entreprise. 33% souhaitent qu’on mobilise leurs avis et leurs expertises pour prendre les décisions stratégiques. Seulement 24% des participants demandent qu’on fasse régulièrement appel à leurs idées pour innover et améliorer l'organisation globale.
Est-ce une remise en cause des projets “d’open innovation” qui ont fortement essaimé ces dernières années dans les entreprises sans réellement transformer en profondeur, la culture des entreprises ni leur organisation ? Une usure liée à cette injonction permanente à innover et faire preuve de créativité ? Un décalage entre les espaces de discussion “autorisés”, ouverts à toutes et tous, et les réflexions stratégiques à fort enjeu qui sont restées la chasse gardée des dirigeants et actionnaires ?
Dans cette hypothèse d’une participation non pas satellisée dans des projets bénins mais recentrée sur les vrais problèmes, le dialogue social occupe une place centrale. Mais un dialogue central rénové dans le sens où il serait inclusif, transparent et régulier.


Top 10 des propositions les plus soutenues

1 - Jean-François Zobrist, DG de FAVI
Eviter de contrôler ses collaborateurs et d’établir des règles sur des points insignifiants et infantilisants”
Chez FAVI, il n'y a plus de contrôle tant de leurs heures d’arrivée que de départ. Le magasin des outils est ouvert en permanence sans surveillance : dès qu’un ouvrier emprunte un outil, il doit pour information remplir un document utile au réassort du magasin. Chacun des ouvriers par ailleurs dispose de la possibilité auprès de la hiérarchie de prendre les clés de voiture de l'entreprise sans avoir à se justifier pour aller voir un fournisseur ou un client, en informant simplement son équipe (ce n'est même pas une obligation, mais une habitude qui a été prise).

2 - Dominique Reignier, Co-fondateur de l'Institut du Travail et du Management Durable (ITMD) et de Kairos Consultants
“Tout collaborateur porte en lui l’exigence de bien faire son travail”.
Imaginez une équipe qui évalue régulièrement la qualité de son travail, la formalise sous la forme d’une boussole de sa performance, et délègue un référent pour négocier les priorités d’amélioration du trimestre au niveau de son entité. La voici tournée vers l’amélioration du travail réel de ses professionnels ; la voici dotée d’un dispositif aux effets multiples : performance durable, accélération des transformations, changement de la posture managériale, nouveau pacte social, …

3 - Dominique Lamoureux, Président du Cercle de l'Éthique des Affaires
“L’éthique, dès aujourd’hui et pour demain”
L’éthique doit faire figure de boussole. En conduisant les entreprises à définir des valeurs et une raison d’être, elle leur permet d’aligner objectifs à court-terme et objectifs à long-terme et d’organiser un meilleur partage de la création de valeur, en favorisant l’engagement des salariés et la confiance des parties prenantes et de la société civile.

4 - Isabelle Kocher, ex-PDG Engie
“Décarboner son modèle d'affaire avec une taxe carbone interne et aligner son offre avec sa raison d'être”
L’avenir des entreprises, de toutes les entreprises, et pas seulement celles du secteur social et solidaire, se trouve dans la réconciliation entre performance économique et durabilité sociale et environnementale.

5 - Cyril Lage, Fondateur de la civic tech Cap Collectif
“Associer les salariés à la définition de la raison d'être”
Comme en témoignent les résultats d’une étude réalisée par l’Ifop en novembre 2019, 69% des salariés interrogés considèrent que la raison d'être est d'abord « une opération de communication » contre seulement 31% qui y voient « avant tout le reflet de convictions sincères ». Pour éviter cet effet déceptif, les entreprises doivent donc associer leur collaborateur à la définition de leur raison d’être afin que celle-ci reflète la réalité vécue des salariés et dessine un cap auquel ils souhaiteront s’associer.

6 - Reem Al Jizawi, Fondatrice CoReach
“Accepter les émotions des collaborateurs et travailler sur son intelligence émotionnelle”
Le coaching permet d'utiliser les ressources intérieures des individus. Plutôt que de leur dire ce qu'ils doivent faire, ils trouvent d’eux-mêmes les solutions. Le coaching est devenu un outil particulièrement puissant. Nous ne sommes pas seulement des êtres cognitifs. Nous développons certes cet aspect de notre être à un stade ultérieur, donc travailler avec le noyau émotionnel correspond à la base qu’il s’agit de mettre en place, avant même de penser à construire autre chose.

7 - Edouard Caumont, Fondateur Part-Life
“Démocratiser le temps partiel pour tous (cadres et non cadres)”.
Souvent demandé a posteriori d’une embauche à temps plein, le temps partiel reste une exception qui n’est pas encore entrée dans les mœurs. Et si le "Temps" était finalement une richesse encore plus importante que les euros sur sa feuille de paie ? De manière pratique, la démocratisation du temps partiel est une solution douce et équilibrée qui permettrait à chacun de trouver son rythme et d’être efficace au travail. Il ne s'agit pas de l'imposer mais de le rendre accessible.

8 - Pascal Demurger, Directeur Général de la MAIF
“Dotons les consommateurs d’un outil leur permettant de reconnaître les entreprises qui s’engagent”
En application de sa raison d'être, la MAIF prend systématiquement en considération les critères environnementaux sociaux et de gouvernance, et réalise aujourd’hui près de 100% de ses placements sur la base de ces critères : Nul producteur de tabac ni fabricant d’armes ne figure dans les placements de la MAIF qui par ailleurs n’investit dans aucun pays pratiquant la peine de mort.

9 - Anne-Claire Berg, VP Culture et Engagement - Danone
“Apprendre pour co-construire le futur en pleine conscience”
L’accès continu à l’information et à la formation sont dès lors des éléments essentiels pour permettre à tous d’exercer leur jugement de façon éclairée et de faire les choix les plus pertinents pour un futur durable. Choisir en pleine conscience. En lançant notre programme Une Personne, Une Voix, Une Action, nous avons décidé de permettre à nos équipes de co-construire l’avenir, en leur donnant les moyens de mieux comprendre pour mieux agir. Nous avons par exemple développé avec les Nations Unies un e-learning diplômant ‘One Planet. One Health’, décryptant des enjeux clés liés à la santé des hommes et celle de la planète.

10 - Céline Schillinger, Fondatrice et PDG - We Need Social
“Laisser s'exprimer l’intelligence collective des collaborateurs pour créer et innover”
Expérience passée chez Sanofi dont voici la conclusion : la solution trouvée est donc très simple. Nul besoin d'avoir un doctorat pour la concevoir. Néanmoins, elle a rendu les équipes opérationnelles très fières, heureuses d'avoir pu la trouver en innovant. Cela leur a permis d'économiser 1000 heures de travail par an sur le site. 1000 heures de travail par an économisées, simplement en n'ôtant pas les étiquettes de chaque flacon...

11 - Vivek Menon, Directeur Danfoss
“Etablir pour chaque collaborateur un plan de développement individuel avec un coach/mentor de son choix”
Au sein de eSteering, une business unit du leader mondial des solutions de réfrigération et de conditionnement d’air danoise dirigée par Vivek Menon, chacun peut choisir son propre ‘sparring-partner’ (partenaire d’entraînement) et établir son plan de développement individuel avec celui-ci. Le ‘sparring-partner’ travaille également avec l'employé sur le suivi du plan.

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