Repenser nos sociétés à l'aune des Objectifs de développement.
La Fondation Jean-Jaurès publie le 2ème rapport* d'Alain Dubois et Jennifer de Temmerman, « Économie et finances durables », avec les contributions de Céline Charveriat, Alain Mamou-Mani, Lucie Pinson, Christophe Revelli, Sébastien Treyer et Michaël Vincent.
Alors que l'épidémie due au coronavirus questionne notre modèle économique et sociétal, cette crise et ces épreuves doivent être l'occasion de transformer notre société pour préserver notre humanité et rétablir l'équilibre de notre planète. Pour y parvenir, l'Agenda 2030 est un outil à exploiter, par la concertation et par une prise de conscience collective. C'est ce que proposent Jennifer De Temmerman et Alain Dubois en s'appuyant sur les expertises d'une vingtaine de personnalités ; celles-ci sont à retrouver dans quatre rapports dont le premier, présenté ici, porte sur les enjeux de gouvernance et développement durable.
La crise est un point particulier dans un cycle ; un moment où une phase de dépression succède à une phase de croissance. Plus généralement, elle désigne une période de stagnation durable de l'économie. Déjà au XIXe siècle, sous l'Ancien Régime, elles existaient. C'est notamment le cas de la disette en 1816 dues aux mauvaises récoltes ; des crises mixtes nées du développement conjoint de l'industrie et de l'agriculture, comme la crise de 1847-1848 en France. À la fin du XXe siècle, on a observé́ de nombreuses crises dans le monde (crise mexicaine de 1994, crise asiatique de 1997, crise argentine entre 2000 et 2001).
En ce début de XXIe siècle, la faillite de la banque américaine Lehman Brothers le 15 septembre 2008 inaugure la crise financière mondiale de 2007-2008 du fait de l'interconnexion entre toutes les places financières mondiales. Les gouvernements et les banques centrales injectent massivement des liquidités dans le système bancaire pour renflouer les banques et rassurer les marchés. À partir de 2010, la zone euro est confrontée à une crise majeure, dite des dettes publiques, avec en priorité une dette importante pour les pays du PIIGS (Portugal, Italie, Irlande, Grèce et Espagne). Avec la crise de 2008, l'endette- ment des États devient insoutenable. Cela s'explique à la fois par la diminution des recettes fiscales à cause de la contraction de l'activité et par les plans de relance de l'économie. Toutes ces crises ont eu des conséquences sociales et démocratiques importantes avec l'augmentation du chômage, la précarité des emplois et la défiance vis-à-vis des politiques.
La crise écologique, causée directement par l'activité humaine, progresse de plus en plus vite sans être suffisamment prise en compte. Les manifestations du changement climatique, telles que l'augmentation de la chaleur océanique et continentale, l'accélération de l'élévation du niveau de la mer ou la fonte du permafrost en sont les illustrations les plus flagrantes. Les activités économiques de l'homme affectent l'environnement et la biodiversité.
Les conséquences économiques, sociales et environnementales du modèle économique choisi et les orientations données à nos politiques publiques posent aujourd'hui la question de la durabilité. On peut déduire du rapport Brundtland de 1987, qui fixe le développement durable, une définition de la dura- bilité. Au sens de ce rapport, le développement durable est un mode de développement qui répond aux besoins du présent sans entraver les besoins des générations futures. Le rapport formule une conception de la durabilité tridimensionnelle à travers l'interdépendance des phénomènes économiques, sociaux et écologiques. Le développement durable a donc une portée plus vaste que la protection de l'en- vironnement et prend en compte la prospérité économique et la solidarité sociétale.
Face à cette succession de crises aux enjeux multiples, penser des modèles économiques et financiers soutenables qui tiennent compte de l'environnement, de la justice sociale se révèle nécessaire pour construire le monde d'après. C'est l'objet même de ce fascicule dans lequel ces sujets seront développés sous le prisme national et européen sans prétendre à l'exhaustivité.