Dans le cadre de ses contrôles thématiques courts des pratiques des sociétés de gestion, l’AMF (Autorité des marchés financiers) a examiné l’organisation de l’évaluation des instruments financiers complexes au sein de cinq sociétés de gestion et les contrôles de second niveau mis en place. Dans un document de synthèse, elle propose un éclairage sur les bonnes et les mauvaises pratiques rencontrées pour mieux accompagner les acteurs.
En application depuis juillet 2014, la directive AIFM sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs prévoit des obligations dont l’objectif est de s’assurer que les différents actifs d’un fonds sont correctement valorisés. Ces exigences portent sur le caractère objectif de cette évaluation, sur la justification et la traçabilité des méthodes employées et des valorisations obtenues.
Après une première série de contrôles SPOT sur les dispositifs d’évaluation des sociétés de capital investissement (dont la synthèse a été publiée en décembre 2018), l’AMF a examiné les pratiques de cinq gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs en matière de valorisation des instruments financiers complexes sur la période 2017-2019.
Sur cette période, les portefeuilles des sociétés de gestion présentaient des expositions à divers instruments financiers complexes parmi lesquels des contrats à terme sur dividendes, des contrats d’échange sur rendement (total return swaps) ou sur le risque de défaillance d’un émetteur de dette (credit default swaps ou CDS), des options sur CDS ou encore des obligations contingentes convertibles.
Organisation de l’évaluation
Sur la période, les cinq sociétés de gestion examinées disposaient bien d’une fonction de gestion des risques indépendante des fonctions de gestion des portefeuilles qui est généralement en charge de l’évaluation. L’AMF relève qu’une bonne pratique consiste à attribuer la responsabilité de l’évaluation à une personne précise.
Politiques et procédures
A une exception près, les politiques et procédures définissent bien les obligations, les rôles et les responsabilités de chacun dans le processus d’évaluation. Toutefois, aucune société de gestion n’a clairement distingué ce qui relève de la politique d’évaluation de ce qui relève des procédures.
Dans la plupart des cas, la description des sources de prix utilisées n’est pas suffisamment détaillée, pour diverses raisons (instruments complexes pouvant appartenir à plusieurs catégories d’instruments financiers mentionnés, absence d’indication concernant l’ordre de priorité des sources de prix ou sources de prix insuffisamment précises). D’une manière générale, le processus de réexamen de la valorisation des instruments, qui peut se faire via un modèle, une autre source et des contrôles complémentaires, par exemple, n’est pas suffisamment décrit. L’AMF a néanmoins relevé une bonne pratique consistant à synthétiser au sein d’un tableau les sources de prix de référence et leur ordre de priorité pour chaque type d’instrument financier complexe utilisé.
Modèles d’évaluation
Toutes les sociétés disposent de modèles d’évaluation utilisés soit pour la valorisation elle-même soit pour le réexamen de l’évaluation effectuée à partir d’autres sources. La synthèse montre que les modèles utilisés pourraient être davantage documentés et appropriés dans leurs hypothèses de modélisation. Ceux utilisés à des fins de réexamen n’ont pas toujours été validés formellement par une personne n’ayant pas participé à leur construction. Dans un cas, les modèles utilisés à des fins d’évaluation (et non pas seulement de réexamen) n’ont pas été approuvés par les instances dirigeantes avant leur mise en œuvre.
Processus effectif d’évaluation et de réexamen de l’évaluation
Dans la plupart des cas, le processus effectif d’évaluation n’est pas en total accord avec celui décrit dans les politiques et procédures, soit parce que les sources de prix de référence prévues n’ont pas été respectées, soit parce que les modalités de réexamen de l’évaluation sont différentes de celles décrites. S’agissant du réexamen, l’AMF a observé que la fréquence d’utilisation du modèle n’était pas toujours adaptée à la nature de titres insuffisamment liquides ou non cotés. Elle a constaté, au sein d’un établissement, la bonne pratique consistant à intégrer systématiquement des prix de transaction dans le contrôle de la pertinence des prix de marché et des résultats du modèle.
Dispositif de contrôle de second niveau
Les plans de contrôle interne des sociétés examinées mentionnent bien des vérifications portant sur les processus d’évaluation et de réexamen de l’évaluation des instruments financiers complexes à l’actif des fonds. Néanmoins, l’AMF a constaté dans un établissement l’absence de contrôle effectué en 2018 et, dans certains cas, des contrôles n’ayant porté que sur une partie des instruments détenus.