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La logistique urbaine entre dans l’ère de l’open data

Tribune de Jean-Charles Deconninck, PDG de Generix GROUP.

En 2050, 70% de la population mondiale habitera dans des centres urbains. La création de mégalopoles va donc s’accélérer, avec la nécessité de gérer de plus en plus de flux (alimentaires, énergétiques…) tout en préservant des terres arables autour des agglomérations.

La ville ne pouvant plus s’étendre en largeur, elle va donc se verticaliser. Associée à la volonté des maires de rendre l’espace aux citoyens et de limiter la pollution liée aux transports, cette situation va s’accompagner d’une diminution des infrastructures routières. Le cœur de ville rendu moins accessible va se révéler un véritable casse-tête pour la livraison de marchandises sur le dernier kilomètre, obligeant les acteurs de la logistique urbaine à repenser en profondeur leurs pratiques.


Penser optimisation maximale de l’usage

Dans les années à venir, la question des flux physiques destinés à alimenter des villes va devenir cruciale. Pour gérer les échanges croissants de fret en provenance des structures aéroportuaires et portuaires, les grandes zones commerciales que nous connaissons actuellement en périphérie des grandes villes se transformeront vraisemblablement en espaces de stockage ou d’éclatement pour ces flux.

Au cœur des agglomérations, là aussi, les choses vont évoluer, puisque la diminution des infrastructures routières est inévitable au vu de la pollution qu’engendre la circulation. Dans ces conditions, comment organiser la logistique urbaine du futur ? L’une des voies à suivre sera d’optimiser à son maximum l’usage des infrastructures déjà existantes. On peut, par exemple, imaginer la création de sites logistiques éphémères, de charges ou de décharges, sur des voies de bus, entre deux transports de passagers. Ou encore, utiliser le métro pendant ses heures de fermeture au public en remplaçant les usagers par du fret dans des rames réaménageables, afin de livrer les commerces de proximité en cœur de ville.


La data et la communication au cœur d’une nouvelle logistique urbaine

Ainsi, les acteurs de la logistique vont devoir travailler non plus sur le volume, mais sur de nouveaux modèles basés sur la fréquence. La cadence des flux sera forcément plus élevée et les gabarits de transports réduits.

Cette évolution nécessite de penser à la façon dont les flux vont être transités. Ce qui va conduire la ville à passer par des procédés logistiques basés sur l’information et la communication. En effet, pour gérer des charges ou des décharges de fret sur des infrastructures de transports existantes comme les voies de bus, les lignes de métro ou de tramway, les logisticiens auront besoin d’avoir accès, en temps réel, à toutes les données concernant ces transports et notamment aux typologies de trafic pour optimiser le passage de leurs propres flux. La ville va donc entrer dans l’ère de l’open data et devra en faire profiter l’ensemble des acteurs concernés : les citoyens, les gestionnaires de la ville, les commerçants, les transporteurs, etc.

Imaginons qu’une ville intègre dans son flux tramway de l’après-midi une rame de fret destiné aux commerces de proximité. Le commerçant concerné devra pouvoir être informé du passage du tramway plusieurs stations en amont, et ce avec une grande précision, afin de se rendre disponible pour récupérer sa marchandise à l’heure prévue et ne pas bloquer le trafic sur la ligne.

Autre problématique à prendre en compte dans cette réflexion autour d’une nouvelle logistique urbaine : la verticalité et donc les flux montants et descendants. Dès la conception des immeubles, les architectes devront penser aux contraintes de l’approvisionnement, en imaginant, par exemple, des étages dédiés à ces flux. Des conciergeries pourront y être installées, par exemple, dans lesquelles les habitants viendront déposer ou récupérer leurs colis et commandes.


Vers un « urbanisme de l’information »

La ville de demain sera donc nécessairement plus intelligente, avec la mise en place de solutions de régulation des flux innovantes, qui lui permettront de gérer les informations trafic en temps réel, de façon dynamique, et de les partager avec les différents protagonistes de la livraison.

De nombreuses réflexions sont déjà amorcées dans ce sens dans les grandes villes du monde, comme à Copenhague ou à Rome. Les projets autour de cette nouvelle gestion des flux urbains ne peuvent cependant aboutir que dans le cadre d’une concertation entre acteurs publics (la ville et ses partenaires) et privés (les transporteurs, industriels, commerçants, etc.). Non seulement la ville doit mettre à disposition des logisticiens ses infrastructures de transport, mais elle doit également leur donner les moyens de s’y greffer.

Une piste à suivre pourrait être celle de la création de « jetons » alloués aux transporteurs ou aux industriels pour un temps imparti et sur une voie donnée (bus, métro, tramway…), dont la valeur varierait en fonction de différents paramètres : lignes empruntées, heures et jours de circulation, impact environnemental, …

Ce qui est sûr, c’est que cette nouvelle logistique urbaine devra faire appel à de l’innovation technologique et organisationnelle, mais surtout à un usage plein et entier de l’ensemble des moyens déjà disponibles dans les villes. À l’horizon des vingt prochaines années, le vrai sujet de la ville en dehors de sa concentration verticale, sera ainsi de mixer l’urbanisme physique et celui de l’information.

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