Pour obéir à la réglementation, les banques de détail doivent engager des investissements contraignants liés à la « connaissance du client ». Mais ces dépenses sont aussi un service rendu à la collectivité.
Par Simon Eid, Partner et Aurobrata Hui, Manager, tous deux chez CAPCO, cabinet de conseil en gestion des affaires
En cette période de grande incertitude pour les banques de détail, le coût des activités lié au KyC (« Know your Costumer ») peut paraître une contrainte supplémentaire demandé aux établissements bancaires qui doivent faire face à une crise économique d’une ampleur inédite. Rappelons que cette « connaissance du client » passe par la vérification de l’identité du client et l’évaluation des risques potentiels liés à l’établissement d’une relation commerciale avec celui-ci. Le KyC s’avère ainsi un investissement humain et financier non négligeable alors que la réglementation, au sein de l’UE, s’est considérablement renforcée au cours des dernières années.
Certes, le KyC ne pose pas de problème pour l’immense majorité des clients répertoriés à faible risque, soit près de 98% de la clientèle de la banque de détail. D’autant que la mise à jour de l’adresse d’un client, de son revenu et des éléments principaux de son patrimoine sont facilités par le « selfcare ».
En effet, le développement des canaux digitaux laisse au client une plus grande autonomie pour renseigner ses informations personnelles. Pour l’établissement financier, il s’agit de réduire au maximum le coût lié à la collecte de ses informations en facilitant autant que possible la relation avec lui, sans l’importuner inutilement. Mis à jour lors de moment clés de la vie d’un client - crédit, investissements financiers - le KyC est ainsi de nature à permettre d’améliorer les services rendus aux clients via l’ajustement des propositions qui pourront lui être faites.
Un devoir d’extrême vigilance à la charge des établissements financiers
Pour un certain nombre de clients considérés « à risque » (personne politiquement exposée, ressortissant d’un pays sous sanction etc.), le sujet du KyC devient en revanche un enjeu crucial pour les banques de détail. La complexité des circuits de l’argent sale (blanchiment, corruption, financement du terrorisme etc.) oblige en effet les établissements financiers à redoubler de vigilance pour « tracer » l’origine de fonds douteux, sous peine de s’exposer à de très graves conséquences en cas de défaillance. Or, la banque joue un rôle privilégié dans la lutte anti-blanchiment en tant qu’opérateur principal des paiements. L’acteur qui voit passer tous les flux est le plus à même d’identifier des activités criminelles.
Rappelons les risques de fortes amendes et d’effondrement de la réputation des banques auprès du public en cas de défaillance majeure. Dans un contexte où les réseaux sociaux s’emballent fréquemment et la pratique du « Name & Shame » se développe, parfois encouragée par les décideurs politiques, le KyC devient une ardente obligation pour les établissements financiers.
Le KyC n’est donc pas une démarche administrative anodine, ni une contrainte supplémentaire demandée à des clients qui peuvent parfois avoir l’impression que leur banque cherche à leur soutirer des informations personnelles et à profiter de ces relances pour faire de la prospection commerciale. Bien au contraire, il s’agit davantage d’une formalité, finalement peu chronophage, mais dont l’utilité pour la collectivité est réelle.
Avec le KyC, l’établissement bancaire et le client de la banque de détail contribuent à une transparence indispensable dans l’intérêt de tous.