Tribune de Dominique Trébuchet, directeur général de La France Mutualiste
Dans un contexte de contraction de l’économie qui va générer des besoins de financement considérables, les assureurs-vie comme La France Mutualiste auront un rôle précieux à jouer : contribuer aux côtés de l’Etat à soutenir le tissu économique français, tout en allégeant le recours aux finances publiques.
Ce rôle est aujourd’hui entravé par les règles de Solvabilité 2.
D’une part, S2 impose une méthodologie de calcul des fonds propres qui pénalise à l’excès l’investissement en actions. D’autre part, il exige une actualisation des modèles à un rythme inutilement rapide, sur la base d’un principe de valorisation des actifs (« mark to market ») excessivement volatile et illisible en période de crise.
Structurellement, ces règles sont sujettes à caution.
Destinées à rassurer les acteurs économiques, leur technicité les rend peu compréhensibles. Conçues pour garantir la solvabilité des assureurs à long terme, elles leur imposent pourtant un pilotage à court terme. Enfin, pénalisant l’investissement des fonds généraux dans les actifs réputés plus risqués de « l’économie réelle », elles limitent le soutien des assureurs à l’économie productive. Avec un effet collatéral : parce qu’ils sont simultanément confrontés à un environnement de taux bas, les assureurs en viennent à « conseiller » aux épargnants d’investir eux-mêmes dans des actifs risqués, au mépris du principe de mutualisation des risques qui est au cœur de l’assurance et de son utilité sociale.
Inefficient en « temps normal », ce cadre est rédhibitoire en temps de crise.
Deux réformes en juguleraient les effets : définir une norme de solvabilité pour les fonds en euros moins volatile (8% sur les fonds euros par exemple), et adapter les règles comptables et prudentielles à des investissements de long terme.
A ces conditions, nous, les assureurs vie, pourrons prendre toute notre part dans la sortie de crise : apporter notre capacité financière aux groupes cotés (actions), à l’Etat (obligations), voire aux sociétés non cotées (fonds de capital investissement ad-hoc, « coronaequity »). C’est à ces conditions que nous pourrons faire notre métier, pour le bien des assurés et de l'économie : notre bien commun.