Le ralentissement de l’économie mondiale, essentiellement dû au coup de frein de l’investissement, n’est pas le préalable à une prochaine récession.
Par Emmanuel Auboyneau et Xavier d'Ornellas, tous deux gérants associés chez Amplegest
Aux Etats-Unis, la lecture factuelle des statistiques confirme une légère érosion de l’économie. Le produit intérieur brut (PIB) du troisième trimestre a été publié à +1,9%, contre +2% au deuxième trimestre. Il est toutefois supérieur de 0,3% au consensus des prévisionnistes. C’est donc un ralentissement graduel, sans rupture, auquel nous assistons. La consommation reste le socle de cette croissance alors que l’investissement des entreprises est le moteur en panne.
Nous croyons qu’à la faveur d’un accord commercial sino-américain les entreprises américaines devraient reprendre le chemin de l’investissement grâce à une meilleure visibilité. Un restockage dans l’industrie, lié à cette augmentation des dépenses, participera à la croissance future. Nous réitérons notre scénario de poursuite du cycle d’expansion américaine au cours des prochains trimestres. L’inflation reste mesurée mais, hors énergie, elle est actuellement à +2,4% en base annuelle, soit au-dessus de l’objectif de 2% de la FED.
La récente baisse des taux de la FED n’est, à nos yeux, pas justifiée. Elle est, selon nous, davantage due à la pression constante des marchés financiers et à l’agressivité de Donald Trump envers Jerome Powell, lequel n’a pas encore marqué son mandat sous le sceau de l’indépendance. Cette réduction d’un quart de point, la 3ème en 2019, devrait marquer la fin de cette séquence de baisse des taux.
L’économie européenne à son point bas
En Europe le ralentissement est incontestable avec l’Allemagne comme principal contributeur. Le pays le plus industriel est celui qui, en tendance, souffre le plus. C’est la conséquence du repli de l’industrie dans le monde et particulièrement du secteur de l’automobile. Christine Lagarde, nouvelle présidente de la BCE, n’a pas attendu le début officiel de son mandat pour critiquer l’Allemagne et les Pays-Bas, deux pays en excédent budgétaire, qui ne font pas la relance souhaitable. Dans l’éternel débat de la cigale et de la fourmi, la fourmi allemande pourrait utiliser une partie des provisions accumulées pour favoriser la reprise.
Avec ou sans plan de relance, nous pensons que l’économie européenne a atteint un point bas. L’Europe dépend également de la résolution du conflit commercial et d’une solution (enfin !) pour le Brexit. Nous tablons sur des avancées notables sur ces deux sujets d’ici à la fin de l’année. L’investissement des entreprises devrait alors repartir du fait d’une meilleure visibilité et soutenir la croissance européenne.
L’économie chinoise semble plus résiliente que prévu. Le géant asiatique s’efforce de maintenir sa croissance grâce à une politique fiscale et budgétaire agressive. Cela compense en partie les effets néfastes de la hausse des tarifs douaniers décidée par le président Trump. Cependant, l’économie chinoise est fragile et ne pourra se passer d’un accord commercial prochain. Le scénario d’une croissance chinoise solide est toujours le nôtre en dépit des incertitudes politiques.
Les marchés actions ont pris acte du ralentissement contrôlé de l’économie mondiale et font le pari d’évolutions politiques favorables et du maintien de taux bas. L’absence de rendement des classes d’actifs sans risque rend nécessaire la diversification vers des actifs plus risqués.
Par ailleurs, la valorisation des actions n’est globalement pas excessive et justifie ces flux favorables. En revanche, les marchés sont de plus en plus exigeants et la moindre mauvaise nouvelle sur une société se traduit par un repli important de son cours de bourse. Cela nous incite à privilégier les entreprises à forte visibilité et à rester très réactifs.