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Les ratés du non-coté, bons pour les investisseurs en actions ?

Par Jim Tierney, Chief Investment Officer - Concentrated US Growth chez AllianceBernstein (AB) et Tiffany Hsia, Senior Research Analyst - Select US Equity Portfolios chez AllianceBernstein (AB)

Il devient évident que les marchés non cotés commencent à donner des signes de surchauffe après l’échec de plusieurs introductions en Bourse très médiatisées. Ceux qui investissent en actions ont tout intérêt à suivre attentivement cette situation, car les difficultés de financement dans le non-coté sont aussi l’affaire des marchés cotés.

Ces derniers mois, les entreprises financées sur le non-coté ont pris conscience que la Bourse n’allait pas leur faire « un chèque en blanc ». WeWork a vu sa valorisation s’effondrer - passant de 47 Mds$ au début 2019 à 8 Mds$ la semaine dernière lors de son sauvetage par Softbank - après l’abandon de son projet de mise sur le marché en raison des inquiétudes liées à l’ampleur de ses pertes et à la structure de l’entreprise. Les actions Uber Technologies et Lyft ont chuté de 27 et 39% respectivement depuis leurs entrées en Bourse au début de cette année. « Les récents échecs signalent un certain retour à la raison sur les marchés des IPO », a écrit dernièrement le Financial Times


L’heure de vérité ?

Le non-coté pourrait bien connaître son moment de vérité. Autrefois, les entreprises qui comptaient sur les financements du capital-investissement pour démarrer leur activité faisaient souvent leur entrée sur les marchés cotés à un stade relativement précoce de leur cycle de vie. Pour lever des fonds en Bourse et ainsi financer leur croissance future, elles devaient traditionnellement se prévaloir d’un modèle économique éprouvé et rentable, la bulle Internet de la fin des années 1990 faisant figure d’exception.
Le montant record des fonds collectés dans le non-coté a fait évoluer les mentalités. Ces dernières années, face à l’abondance des liquidités dont pouvaient facilement disposer les entreprises non cotées, nombre d’entre elles ont choisi de rester plus longtemps à l’écart de la Bourse, et d’échapper, à tout le moins en partie, à l’examen minutieux indissociable de toute cotation - ainsi qu’à une certaine exigence de rentabilité. Si l’on considère les excédents actuels de capitaux privés (et le peu d’options d’investissement), les valorisations et conditions qui prévalent sur le non-coté pourraient signaler une surchauffe. 


Rationalisation du non-coté : quel impact ?

La situation commence à se lézarder sur plusieurs fronts. En plus des introductions en Bourse ratées, des sociétés encore non cotées, telles que WeWork et Juul, évoluent maintenant à des niveaux de valorisation sensiblement inférieurs à ceux estimés dans le cadre de leurs dernières levées de fonds. En outre, les entreprises qui continuent d’accuser de lourdes pertes devront procéder à de nouveaux tours de table dans l’unique but de rester en activité.  Les implications sont complexes, mais cette tendance est à surveiller de près, que l’on investisse sur le marché coté ou non coté. Une rationalisation du non-coté pourrait potentiellement avoir les conséquences suivantes :

- Une concurrence plus sensée : l’afflux de capitaux dans le non-coté a permis à des entreprises non rentables de se financer pendant une plus longue période d’incubation que la normale, renforçant ainsi artificiellement la concurrence et éliminant l’inflation. Si Uber subventionne chaque course tout en perdant plus d’un milliard de dollars par an, les sociétés de taxis et limousines se retrouvent sous pression, les clients payant moins que le coût réel du service. En cas de crise du non-coté, les modèles économiques qui ne sont pas pérennes pourraient ne plus être tolérés, et les acteurs possédant de réels avantages concurrentiels tireraient profit d’un marché plus rationnel. Pour nous, les plus grandes entreprises technologiques pourraient en bénéficier directement, dans la mesure où bon nombre d’entre elles ont été incapables de rivaliser à n’importe quel prix avec des concurrents non cotés, étant plus étroitement surveillées par leurs actionnaires.

- Une amélioration des politiques de gouvernance : la débâcle de WeWork a mis en relief l’importance de la gouvernance d’entreprise. Face à l’intérêt croissant suscité par son directeur général, Adam Neumann, et d’autres hauts responsables pour des questions de gouvernance, les investisseurs ont perdu leur appétit pour cette entrée en Bourse. Ceux qui investissent sur les marchés cotés devraient toujours se demander, selon nous, s’ils souhaiteraient faire affaire avec les personnes qui sont effectivement aux manettes d’une entreprise, au demeurant, attractive. La rationalisation du capital-investissement mettra un coup de projecteur sur les entreprises, qui les obligera à réexaminer de près leur modèle de gouvernance avant de chercher à lever des fonds sur le marché coté ou non coté.

La discipline revient à la mode. Au cours de la dernière décennie, les investisseurs des marchés non cotés ont toléré une attitude laxiste en matière de rentabilité parce que dans un environnement de taux faibles, les marchés financiers regorgeaient de capitaux à investir en début de cycle pour une période prolongée. Les entreprises étaient encouragées par les capital-risqueurs qui les soutenaient à rechercher la croissance à tout prix, dans l’espoir d’obtenir toujours plus de financements.

Dorénavant, il leur faudra s’adapter à un contrôle plus rigoureux, et des champions commenceront à se détacher du peloton. Avec le temps, les investisseurs en actions qui sont restés concentrés sur une croissance bénéficiaire et des modèles économiques pérennes devraient être récompensés pour leur discipline dans un marché moins généreux en financements pour les entreprises de croissance se trouvant à un stade précoce de leur développement.

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