Une transition politique moins violente que prévue et une croissance économique respectable, et soutenable, laissent entrevoir de belles perspectives sur le marché actions.
Par Philip Ehrmann, gérant du fonds Jupiter GF China Sustainable Growth chez JupiterAM
Lors de la majeure partie de l’année dernière, il semblait être à la mode parmi les économistes, les commentateurs politiques et autres analystes de parler de la Chine comme d’un accident sur le point de se produire. Un net ralentissement de la croissance économique, des inquiétudes concernant le niveau d’inflation, la menace de la formation d’une bulle immobilière et un changement complexe à la tête du Parti Communiste étaient vus comme autant de raisons pour pousser les investisseurs à la prudence. Une avance rapide jusqu’en 2013 nous permet de constater que ces craintes étaient, selon nous, exagérées.
Pour nous, les autorités chinoises ont bien fait de ralentir une croissance qui n’était franchement pas soutenable sur le long terme. L’atterrissage forcé que de nombreux économistes avaient prédit n’a finalement pas eu lieu. L’économie chinoise a crû d’un respectable 7,8% en 2012, chiffre plus élevé que les prévisions du gouvernement chinois, avec un rythme de croissance particulièrement soutenu sur le dernier trimestre montrant ainsi des signes clairs d’accélération. Même si ce niveau de croissance n’est pas en ligne avec le record de 9,5% de 2011, il est suffisamment élevé, selon nous, pour dissiper les craintes concernant la santé économique de la Chine. FMI prévoit maintenant une croissance de 8,2% pour 2013 et de 8,5% pour l’année suivante – une indication forte, selon nous, que la Chine est à nouveau sur la bonne voie.
Un passage de relais politique complexe qui se passe sans problème
L’incertitude politique en 2012 brouillait encore davantage les cartes pour les investisseurs. Le changement à la tête du Parti Communiste chinois, qui n’a lieu qu’une fois tous les 10 ans, était vu par beaucoup d’analystes politiques comme un moment périlleux du fait des fortes divisions au sein-même du parti. Oui, la température est effectivement montée au moment du congrès, mais l’élection de Xi Jiping au poste de secrétaire général du Parti et de président de la Chine s’est déroulée sans heurts, aidant ainsi à dissiper les inquiétudes à propos d’une guerre interne qui venaient assombrir l’horizon des investisseurs.
Si nous choisissons de prendre pour argent comptant l’engagement du nouveau gouvernement de s’attaquer à la corruption et à la bureaucratie excessive, le climat pour investir en Chine s’est, selon nous, considérablement amélioré.
Les valeurs chinoises semblent peu chères
Dans ce contexte, les actions chinoises restent pour nous très attractives. Le niveau des valorisations a significativement baissé, avec l’indice MSCI China se négociant actuellement autour de 9 fois les bénéfices prévus. Les entreprises connaissant une croissance relativement faible ont particulièrement souffert, avec des valorisations pour certaines d’entre elles renouant avec les plus bas atteints au moment où le pays était plongé dans la crise du SARS en 2002, époque à laquelle une maladie respiratoire virale avait semé la panique et provoqué une fuite des capitaux étrangers. Les actions chinoises nous semblent donc peu chères à un moment où la performance du marché actions est manifestement sur le point de s’améliorer.
Créer des champions nationaux dans les industries clé
Les industries que nous aimons particulièrement sont celles qui ont été qualifiées comme étant « les nouvelles industries stratégiques » par les autorités chinoises en juin dernier, lors de l’annonce du 12ème plan quinquennal. Ces pans de l’économie, qui incluent entre autres les énergies nouvelles, la protection de l’environnement et les technologies de l’information, sont composés d’une multitude de petites et moyennes entreprises ayant un énorme potentiel de croissance. Le gouvernement chinois s’est lui-même fixé un objectif ambitieux pour être certain que ces industries compteront pour 15% du PIB du pays d’ici 2020, alors qu’elles ne pèsent que 4% à l’heure actuelle. Etant donné que l’économie chinoise devrait doubler de taille d’ici là, les rendements potentiels sont significatifs.
Nous avons réduit notre sous-exposition au secteur financier chinois en ajoutant à notre portefeuille une sélection de banques et sociétés immobilières qui devraient, selon nous, profiter de la politique d’assouplissement monétaire du pays et de ses mesures de relance. Parmi les bancaires, nous avons augmenté nos positions sur Industrial & Commercial Bank of China, China Construction Bank et Bank of China. Nous avons aussi accru notre ligne sur le promoteur immobilier Soho China. Parallèlement, nos expositions aux courtiers Guotai Junan et Citic Securities ont fortement contribué à la performance du fonds, du fait des plans du gouvernement pour déréguler l’industrie.
Même si les perspectives de l’économie chinoise sont encourageantes pour 2013, nous allons continuer d’éviter les secteurs tels que l’acier et l’aluminium qui nécessitent une réorganisation profonde. Ce sont typiquement des industries qui, selon nous, souffrent beaucoup d’une surcapacité et qui restent trop dépendantes des subventions publiques.