Depuis le début de l’année, les actions européennes sous-performent face aux actions américaines. Plusieurs raisons : la crise italienne, le sentiment d’un tassement de la croissance sur le Vieux continent et les risques sous-jacents à la stratégie de Donald Trump en matière de commerce international. L’amélioration des indicateurs conjoncturels actuellement observée permettra-t-elle de tirer parti de ce décalage de performance ?
Le point avec par Julien Bonnin et Charles Haddad, gérants actions chez BFT Investment Managers.
L’horizon semblait se dégager sur les actions européennes en ce début d’année mais le bras de fer engagé par l’administration américaine sur le front commercial, la crise politique en Italie et les indicateurs économiques en berne au premier semestre ont eu raison de l’optimisme observé. Les marchés européens dans leur ensemble ont évolué sans réelle tendance tout en présentant une volatilité plus élevée qu’au cours de l’an passé.
L’été s’est quant à lui révélé plus calme et les bonnes surprises ont commencé à faire leur retour. La « stratégie d’agression commerciale » des Etats-Unis vis-à-vis de l’Europe semble désormais avoir cédé la place au dialogue et les indicateurs économiques donnent quelques signes tangibles d’amélioration.
La conjoncture reste toujours solide
En Allemagne, la croissance est revenue au-dessus de 2% en rythme annuel, atténuant un premier trimestre décevant. Les quelques craintes au sujet de la croissance européenne peuvent ainsi être relativisées, d’autant plus que la croissance en Espagne a été au rendez-vous (3% depuis trois ans en rythme annualisé). Par ailleurs, la progression de l’activité en zone euro est suffisante pour maintenir une pression baissière sur le taux de chômage : 8,4% soit un plus bas depuis 9 ans.
Les entreprises européennes, qui bénéficient de ce climat économique porteur, devraient également profiter jusqu’en fin d’année de la récente baisse de l’euro face aux autres devises. Toutes choses égales par ailleurs, les entreprises exportatrices vont ainsi gagner en compétitivité prix à l’échelle internationale, améliorant de fait leurs marges et leurs résultats financiers.
La faiblesse de l’euro est en partie imputable à la politique monétaire toujours très accommodante. Même si le QE de la BCE prendra fin en décembre 2018, l’impact sur les marchés d’actions européens resterait contenu et la prime de risque toujours attractive. Les entreprises continueront de bénéficier d’un financement à bas coût pour une période de temps prolongée, du fait que la BCE ne relèvera pas ses taux avant la fin de l’été 2019. Toutefois ce regain d’activité reste fragile et conditionné par l’absence de tensions en provenance de l’Italie.
Deux sujets à surveiller : l’Italie et la « guerre commerciale »
- L’Italie reste en effet le principal sujet de préoccupation pour les institutions européennes et les investisseurs en cette période de rentrée. Le budget italien, qui retient toute l’attention, doit être discuté par le gouvernement fin septembre puis validé par la Commission européenne courant octobre. En cas de dissensions, voire de confrontation ouverte, les marchés pourraient traverser une phase de volatilité substantielle. Les agences de notation devront par ailleurs se prononcer au même moment sur la note de crédit du pays. Pour les investisseurs, il convient dès lors de conserver une exposition limitée aux actions italiennes en attendant de connaitre avec exactitude la feuille de route budgétaire italienne.
- Le second sujet à surveiller, celui du bras de fer commercial entre les Etats-Unis et l’Europe, semble entré dans une phase de détente ; toutefois on ne peut pas exclure d’éventuels rebondissements. Notons néanmoins que si la croissance européenne se révèle solide, voire accélère, la décote dont souffrent actuellement les actions européennes du fait de ces risques politiques ne serait plus justifiée, et motiverait même un mouvement de rattrapage.
Les valeurs à privilégier dans ce contexte se trouvent au sein des secteurs technologique, industriel et santé
- Le premier présente un intérêt dans une optique de long terme en comportant plusieurs entreprises innovantes et en forte croissance.
- Le second permet de profiter de la reprise cyclique en cours. Les valeurs industrielles sont par ailleurs nombreuses au sein du segment des petites et moyennes entreprises (small & mid caps), par nature plus dynamiques que les grandes sociétés (large caps) en périodes de reprise.
- Le segment de la santé présente également des opportunités d’autant que les perspectives de croissance restent solides à long terme.
Pour aborder ces secteurs, il est enfin important de tenir compte de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance pour ne pas investir dans des entreprises polluantes ou sujettes à des controverses. On ne répétera jamais assez qu’un bon investissement doit en effet tenir compte de ces critères extra-financiers pour exclure les sociétés qui ne s’intègrent pas dans une démarche de progrès, au risque qu’un scandale vienne un jour impacter leur réputation et donc leur parcours boursier.