Par Warin Buntrock, Directeur adjoint des gestions, BFT IM.
Les éléments statistiques issus de la finance comportementale sont riches d’enseignements pour mieux comprendre les évolutions des marchés financiers en complément d’une analyse fondamentale.
Nous observons tous les jours que le prix d’un actif financier peut s’écarter pendant longtemps de sa valeur fondamentale. Les investisseurs le savent bien : la rationalité financière ne peut en effet pas être limitée à la seule observation des fondamentaux. La finance comportementale offre un relais bien utile pour nous aider à mieux comprendre les marchés. Cette discipline, née dans les années 1970 au sein de l’Ecole de Chicago, et qui compte deux prix Nobel, le professeur Kahneman en 2002 et le professeur Thaler en 2017, étudie la manière dont les acteurs ou les groupes d’acteurs présents sur les marchés réagissent aux évolutions des prix et influent sur eux. Ils ont mis en évidence le fait que les décisions financières sont souvent prises sur des critères autres que la valeur fondamentale. On parle alors de «biais cognitifs», parmi lesquels deux exemples courants.
Le biais de confirmation : nous avons tendance à extrapoler une tendance récente ou nous ne retenons pas les informations qui ne vont pas dans le sens de ce que nous croyons. Un autre exemple fréquent sur les marchés, la dissonance cognitive : nous avons tendance à nous attribuer le mérite des réussites et à attribuer à des facteurs extérieurs défavorables les échecs. Pour combattre ces biais comportementaux et améliorer les mécanismes de gestion des risques en portefeuille, il devient nécessaire d’intégrer des éléments de finance comportementale dans les processus de gestion.
Des approches de finance comportementale
Première approche : diagnostiquer le profil de risque dans lequel évoluent les marchés. Il existe trois régimes de volatilité type : le régime de crise (risk off), le régime calme (risk on) et un régime intermédiaire, entre les deux. Un gérant pourra prendre davantage de risques dans un régime calme que dans un régime agité, car le risque de pertes est plus important lorsque la volatilité est élevée. La deuxième approche consiste à déterminer si un marché se trouve actuellement dans une tendance ou non. Il s’agit d’une approche purement statistique, volontairement détachée des métriques fondamentales. La méthodologie est basée sur la combinaison d’un ensemble d’indicateurs techniques, comme le croisement de moyennes mobiles ou encore des signaux permettant d’évaluer la puissance ou la pérennité de la tendance. Si une tendance est confirmée, cette approche permet au gérant de rester positionné sur celle-ci, même si la valorisation est élevée. Il diminuera alors par précaution sa position.
Quels sont les signaux comportementaux actuels ?
Après une période d’insouciance et d’appétit presque irrationnel pour le risque, qui a duré jusqu’en janvier de cette année, les marchés se sont brutalement inversés en février avec un bond de la volatilité. Pour autant, ce phénomène est resté circonscrit aux marchés actions sans contagion aux autres marchés. Cette analyse permet de maintenir une vue positive sur les actions. Si le calme semble revenu sur les indices boursiers, un retour aux niveaux de volatilité extrêmement bas que nous avons connus en 2017 n’est pas anticipé. Nous avons définitivement changé de régime de volatilité et nous nous trouvons désormais dans une phase intermédiaire, sans être déjà entré dans un régime agité. Les marchés actuels se caractérisent donc plutôt par l’absence de tendances fortes.