Tribune de Sophie Marivain, Responsable juridique patrimonial et fiscal Nortia
Le remplacement de l’ISF par l’IFI (impôt sur la fortune immobilière) a été une très bonne nouvelle pour les ménages soumis à cet impôt, leur assiette fiscale étant désormais réduite. Pour autant, les modalités de calcul peuvent être plus complexes dans certains cas, et restent parfois floues.
Si l’instauration de l’IFI est indéniablement une bonne nouvelle pour les particuliers anciennement soumis à l’ISF, l’on ne peut pas dire que cette mesure fasse partie du « choc de simplification » prévu par le gouvernement. Si la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) permet en effet aux particuliers d’y voir globalement plus clair sur le niveau d’imposition auquel ils seront soumis, l’IFI apporte au contraire davantage de complexité, notamment pour les détenteurs de parts de SCPI et d’OPCI.
Une difficulté : la prise en compte des quotes-parts immobilières
En effet, l’assiette fiscale de l’IFI ne se limite pas aux possessions immobilières « physiques » (résidence principale, résidence secondaire et investissement locatif), mais s’applique également à la possession de produits d’épargne investis en immobilier, notamment les parts de SCPI et d’OPCI généralement détenues dans le cadre d’une assurance-vie.
Ce choix, a priori logique, se révèle être un véritable casse-tête pour les déclarants du fait que l’IFI ne s’applique qu’à la quote-part de ces produits réellement investie en immobilier. Cette quote-part est bien sûr différente en fonction de chaque société de gestion et de chaque produit, et varie par ailleurs au fil du temps. Les déclarants doivent donc désormais se renseigner sur la part d’immobilier présente au sein des SCPI et des OPCI auxquels ils ont souscrit pour pouvoir remplir leur déclaration d’IFI.
La difficulté de cette tâche tient à l’absence de coordination des sociétés de gestion pour communiquer ces données. Certaines les envoient directement aux particuliers détenteurs des parts, tandis que d’autres les communiquent aux compagnies d’assurance-vie au sein de desquelles ces produits sont détenus. In fine, ce sont les assureurs-vie qui se chargent de rassembler ces informations éparses pour les communiquer à leurs clients.
Des modalités de déclaration parfois encore floues
Plus globalement, les déclarants peuvent également être troublés par les quelques imprécisions qui entourent toujours les modalités exactes de la déclaration de cet impôt. L’ensemble de ces modalités (base taxable, abattements, exonérations), inspirées de l’ancien ISF, sont uniquement définies dans la Loi de finances 2018 de manière succincte. Le ministère des Finances n’a apporté aucune précision supplémentaire sous forme de commentaires ou de décrets. En conséquence, certaines questions pointues peuvent encore rester sans réponses.
Dans ces cas spécifiques, les déclarants doivent parfois essayer de comprendre l’esprit du législateur et faire appel au bon sens pour déterminer la manière dont certains éléments doivent être déclarés. Pour éviter de commettre des erreurs d’interprétation, l’avis de cabinets spécialisés est parfois utile. Heureusement, le gouvernement a toutefois déjà annoncé qu’il saura faire preuve de tolérance envers les particuliers ayant commis une erreur dans leur déclaration si ceux-ci semblent de bonne foi. Pour les déclarants, cette incertitude peut néanmoins être inconfortable. Le gouvernement aurait tout intérêt à clarifier ses attentes en apportant plus de détails pour que les déclarants puissent effectuer leurs démarches avec davantage de sérénité.
Faut-il envisager des alternatives aux SCPI et aux OPCI ?
Actuellement, les particuliers soumis à l’IFI sont peu nombreux à avoir cherché à réduire leur assiette fiscale en vendant leurs parts de SCPI et d’OPCI pour se tourner vers d’autres alternatives non soumises à l’IFI. La raison est simple : ces produits offrent un rendement compris entre 4 et 5% par an, nettement supérieur à la plupart des autres placements, notamment par rapport au fonds en euros. Les Français restent par ailleurs attachés à l’investissement dans la pierre malgré l’adoption de l’IFI.
Les préférences des investisseurs pourront néanmoins évoluer dans les prochains mois, ne serait-ce que pour simplifier leurs démarches de déclaration fiscale. Pour les ménages soumis à l’IFI, les arbitrages en faveur d’autres produits que les SCPI et les OPCI pourraient être encouragés pour bénéficier d’une fiscalité plus faible. Pour les ménages non soumis à cet impôt, ces produits restent en revanche intéressants dans une optique d’investissement à long terme.
Reste alors la piste peu explorée à ce jour du développement de la retraite par capitalisation. Une option qui répond à une pratique déjà bien ancrée dans les mentalités : parmi les 85% de Français qui déclarent avoir déjà réalisé un placement, « financer sa retraite » apparaît comme l’une de leurs principales motivations. Le gouvernement aurait ainsi tout à gagner à soutenir cette tendance pour accompagner une réforme ambitieuse, mais périlleuse.