Point de vue de Bernard Aybran, Directeur de la multigestion, Invesco AM.
Avec une progression de près de 6% en janvier, les actions mondiales ont connu un mois particulièrement positif, bien supérieur aux moyennes historiques. Les statisticiens parleraient dans leur langage d’un événement à deux sigmas. Dans ces conditions, les investisseurs peuvent rechercher des stratégies qui ont été à la traîne dernièrement et s’interroger sur les meilleurs performeurs.
Alors que la corrélation atteint des niveaux très élevés entre les marchés des grandes régions, des stratégies thématiques permettent une certaine diversification. On compte les rachats d’actions parmi les stratégies en retard sur les derniers mois. La réforme des impôts aux Etats-Unis pourrait redonner l’avantage aux entreprises rachetant une proportion significative de leur flottant, plus connu sous l’anglicisme « buyback ». Ces stratégies ont eu le vent en poupe en début de cycle économique : des conditions financières ultra accommodantes grâce à l’apport des Banques Centrales ont encouragé les entreprises à réviser leur structure capitalistique en procédant à des rachats d’actions par l’émission de dette, le coût de cette dernière étant nettement inférieur au rendement exigé par les actionnaires. Réduire le flottant de la sorte via un rachat en cash est neutre d’un point de vue comptable, mais cette stratégie est souvent perçue par le marché comme un signe de confiance du management vis-à-vis des perspectives de l’entreprise, et c’est aussi un soutien technique via des pressions constantes à l’achat sur les marchés. Seulement, la source s’était manifestement tarie. Après un pic à près de 600 Mds$ en 2016, la somme agrégée des buybacks est retombée à 517 Mds$ en 20173. Mais la réforme des impôts américaine est un changement de paradigme qui devrait permettre à la thématique de retrouver son lustre.
Au contraire de la stratégie de rachats d’actions, les valeurs technologiques ont compté parmi les meilleurs performeurs : elles sont le principal contributeur à la performance des actions américaines et émergentes sur les 5 dernières années. Mais les avis restent partagés sur leurs perspectives.
En ce sens, la progression de l’indice Nasdaq 100 est très parlante. Depuis fin 2008, l’indice est en hausse de 483%, soit 21,6% en performances annualisées, de quoi rendre nerveux les investisseurs présents sur ce marché et envieux les autres. De plus, le souvenir de l’année 2000 et la forte dépendance du secteur d’un petit nombre titres ne militent pas en sa faveur. Cependant, au regard de la croissance des bénéfices attendue cette année, le secteur semble attractif : le consensus des analystes estime entre 9,1 et 15,5% (selon les régions) la progression des bénéfices, ce qui place le secteur parmi les meilleures attentes après l’énergie et les financières. Du point de vue des valorisations, le secteur traite à 21 fois les bénéfices, soit environ 27% plus cher que la médiane des 10 dernières années5. Mais cela est aussi vrai pour de nombreux secteurs cycliques. Quant au positionnement des investisseurs, il ne semble pas que ce dernier soit excessif. L’analyse des flux sur les fonds de gestion active et les ETFs montre plutôt une désaffection en 2017. Ce sont plutôt les investisseurs institutionnels qui ont été acheteurs du secteur et se retrouvent « neutres » aujourd’hui, après un positionnement net vendeur depuis plusieurs années. Dans un monde toujours plus « connecté » et « automatisé », les valeurs technologiques semblent avoir leur place dans un portefeuille, à condition de surveiller attentivement les tendances bénéficiaire
Peu de changements dans les stratégies multi-gérants Invesco ont été opérés au cours du mois de décembre. Sur la partie actions, le positionnement demeure cyclique, les secteurs énergie, matières premières et financier et biotechnologie étant privilégiés. D’un point de vue régional, le Japon reste privilégié ainsi que l’Europe, dans une moindre mesure. Nous restons constructifs sur les émergents et sommes sous-pondérés sur les actions américaines avec un positionnement sectoriel spécifique face à un marché dans l’ensemble richement valorisé. Sur la partie obligataire, nous avons diminué notre allocation déjà très faible aux emprunts d’Etat en coupant le reliquat de notre position sur les bons du trésor américain à 10 ans. Avec une activité économique globale robuste et les prix des matières premières en hausse constante ces derniers mois, la classe d’actifs est à la merci d’une correction significative. Sur le crédit, le positionnement reste défensif. Cependant, au sein de la classe d’actifs, les instruments les moins sensibles aux taux d’intérêt comme le high yield restent privilégiés. Seule la dette émergente en devises locales offre un rendement suffisant pour justifier le risque pris. Sur la partie devises, le positionnement reste relativement neutre sur le dollar américain, une exposition modérée est maintenue sur un panier diversifié de devises de pays développés et émergents.