Croissance économique solide, progression des bénéfices, banques centrales toujours accommodantes : l’horizon semble dégagé sur les marchés pour les mois à venir. Attention toutefois aux défis que devront relever les marchés au second semestre.
L’Analyse de Mabrouk Chetouane, Directeur de la Recherche et de la Stratégie, Laurent Gonon, Directeur des Gestions et Fabien Bourguignon, Directeur de la gestion Multi Asset, tous trois chez BFT IM.
L’année 2018 semble bien partie pour s’inscrire dans la lignée de l’année 2017, avec des indicateurs économiques au vert dans la quasi-totalité des régions du monde. Cette situation, bénéfique aux marchés actions, nécessitera toutefois d’adopter une stratégie plus fine sur les marchés de taux.
L’économie européenne poursuit son retour en force
En Europe, « La croissance devrait rester forte, en particulier au cours du 1er semestre 2018. Cette croissance est de nouveau uniformément répartie et profite à tous les pays de la zone euro. La France est pleinement partie prenante de ce mouvement », souligne Mabrouk Chetouane. Depuis de nombreux mois en effet, les bonnes surprises économiques s’accumulent et cette tendance semble encore vouée à se poursuivre, ce qui ouvre de belles perspectives pour les marchés actions européens.
Le manque de dynamisme qui a caractérisé l’économie du Vieux continent au cours des dernières années semble ainsi révolu. Certains signes ne trompent pas : les difficultés de recrutement sont devenues le principal frein de l’économie européenne à cause d’un déficit de candidatures à certains postes. « Ces problèmes d’offre sont assez nouveaux en zone euro » commente Mabrouk Chetouane, qui souligne leur signification positive sur le plan économique : « Le chômage devrait continuer à baisser, ce qui devrait se traduire par des pressions à la hausse sur les salaires ».
Banques centrales : l’heure de la normalisation a sonné
Hausse des salaires et inflation vont de pair. Encore timide, l’inflation européenne devrait donc continuer à progresser, poussant la BCE à normaliser progressivement sa politique monétaire. « On peut attendre de la BCE un arrêt progressif du programme de rachat d’actifs entre septembre et décembre 2018, puis une première remontée du taux de facilité de dépôt au cours du 1er semestre 2019 », envisage Mabrouk Chetouane. D’ici là, la politique de la BCE restera très accommodante et continuera à soutenir les marchés en 2018.
La Fed devrait quant à elle relever à trois reprises ses taux directeurs en 2018 et deux fois en 2019 si elle s’en tient aux projections actuelles des membres du FOMC. Les investisseurs, qui ne croient toujours qu’à deux hausses de taux en 2018, devront probablement ajuster leurs anticipations.
Remontée des taux : comment s’adapter ?
La remontée des taux s’est déjà concrétisée en ce début d’année sur le segment des taux longs souverains, suscitant quelques inquiétudes. Laurent Gonon confirme cette tendance : « Cette année, les taux souverains sont appelés à remonter aux Etats-Unis comme en zone euro, bien que cette hausse devrait rester modérée ».
Dans ce contexte, les investisseurs doivent continuer à privilégier en Europe les titres de courtes et moyennes échéances plutôt que les maturités longues dans leurs portefeuilles obligataires, et aller chercher davantage de rendement sur les émissions des pays périphériques. La prudence reste de mise en ce qui concerne les actifs risqués : « Sur le high yield américain, il faut faire attention aux conséquences d’une éventuelle fin de cycle. Nous profitons plutôt de la période pour prendre nos profits sur le crédit en général » explique Fabien Bourguignon. Aux Etats-Unis, le mouvement de remontée des taux est pour sa part bien amorcé et incite à éviter cette zone sur le plan obligataire.
Echéances politiques : un défi pour le second semestre
Malgré l’horizon dégagé des prochains mois, les marchés feront face à de nouveaux défis à partir de cet été. « L’incertitude politique va se renforcer au 2ème semestre, à la fois dans la zone développée et dans les pays émergents », souligne Laurent Gonon. Les élections au Mexique (juillet) et au Brésil (octobre) pourraient avoir un impact sur les marchés émergents, en particulier sur les devises. Au Royaume-Uni, de nouvelles tensions liées à la poursuite des négociations du Brexit pourraient survenir, ce qui incite à rester à l’écart des actifs britanniques. Des incertitudes pourraient enfin apparaître aux Etats-Unis en fin d’année avec les élections de mi-mandat où les Républicains pourraient perdre leur majorité au Sénat. La réforme fiscale décidée en 2017 pourrait également donner des résultats inférieurs aux attentes du consensus sur la croissance américaine.
Dans ce contexte, les marchés actions seront-ils capables de poursuivre leur progression malgré leur cherté ? L’optimisme reste prédominant : « La croissance des bénéfices d’entreprises est attendue aux alentours de 10% dans l’ensemble des grandes régions du monde en 2018. Même sans hausse supplémentaire des multiples de valorisation, les marchés actions seront soutenus par cette accélération », conclut Laurent Gonon.