Par Norman Villamin, CIO banque privée - Union Bancaire Privée.
Les discussions autour des matières premières ont eu tendance, ces dernières années, à porter invariablement sur l’or, et cette concentration pourrait détourner les investisseurs des niveaux extrêmes observés en dehors de l’univers des métaux précieux dans une perspective de long terme.
En effet, en termes ajustés de l’inflation, les matières premières s’approchent de leurs plus bas enregistrés vers la fin des années 1990, qui était un contexte de marché baissier. La raison de ce recul en termes absolus et réels a été l’éclatement de la bulle de la demande de matières premières en Chine, l’économie ayant vu sa croissance réelle passer de 10/15% par an à 6/7% ces dernières années.
La conséquence immédiate pour les entreprises, qui investissent généralement sur des cycles de 5/10 ans, a été une période prolongée d’offre excédentaire, forçant les sociétés à assainir leur bilan ou à réduire leurs capacités, ou encore, pour les plus mal en point, à cesser leur activité. Après un marché baissier de 5/6 ans sur les matières premières, les bases d’une performance des prix plus durable se sont mises en place, en raison d’une réduction de l’offre nouvelle qui résulte de la coupe agressive des dépenses d’investissement et de la baisse des stocks.
Du côté de la demande, la croissance globale synchronisée, observée pour la première fois depuis la crise financière de 2008/2009, constitue un soutien important à la demande de matières premières. Par conséquent, les fondamentaux de nombreux segments de matières premières ont cessé de peser sur les prix et aussi sur la profitabilité, pour les investisseurs en actions et en crédit de ces segments.
L’agriculture étant soumise aux aléas de la météo, la meilleure visibilité de l’offre sur le long terme dans les matières premières industrielles et sur le segment des métaux et de l’industrie minière - combinée à une amélioration du bilan des leaders de l’industrie - crée une opportunité pour les investisseurs dans une perspective de long terme. Les producteurs d’aluminium, de cuivre et de minerai de fer, dont les bilans sont de bonne qualité, paraissent bien positionnés pour tirer parti de ce contexte.
Dans le secteur de l’énergie, tandis que la flexibilité de la production de pétrole de schiste américain constitue une incertitude à court terme, la réduction des dépenses d’investissement de long terme observée ces dernières années signifie qu’un déséquilibre plus marqué entre l’offre et la demande pourrait apparaître en fin de décennie, ce qui serait favorable pour les investisseurs de long terme. A court terme, la réduction des investissements et une meilleure allocation du capital parmi les entreprises américaines d’exploration et de production suggèrent que, même avec une évolution latérale des prix de l’énergie et compte tenu du plafonnement de la production à moyen terme, les investisseurs sur les actions et le crédit pourraient profiter de solides catalyseurs pour dynamiser leur performance.
Bien que le contexte géopolitique de plus en plus incertain justifie pleinement une exposition à l’or, nous pensons que le principal obstacle à un rally soutenu du métal jaune est la perspective d’une hausse continue des taux d’intérêt réels, non seulement aux Etats-Unis, mais aussi au sein de la zone euro, étant donné que la BCE entend réduire son programme de rachats obligataires en 2018.