Si certaines grandes entreprises sont désormais soumises à l’obligation d’émettre un rapport extra-financier, des PME commencent à s’engager volontairement dans cette démarche sous la forme d’un rapport intégré.
Michel Gire, associé Baker Tilly France*, spécialiste de la responsabilité sociétale des organisations, explique pourquoi cette démarche préfigure la manière dont les entreprises vont rendre compte de leurs actions dans le futur.
Cette obligation concerne les sociétés cotées pour les exercices ouverts après le 31 décembre 2011, et certaines sociétés non cotées, à partir de l'exercice clos au 31 décembre 2016, pour celles qui atteignent un total du bilan ou un CA supérieur à 100 M€ et qui comptent au moins 500 salariés. Les SAS et les sociétés consolidées n’y sont pas soumises. Ce rapport des données environnementales, sociales et sociétales, appelé également « rapport RSE », doit être audité par un organisme tiers indépendant, accrédité par la Cofrac, qui peut être le commissaire aux comptes - à condition qu’il ait obtenu ladite accréditation.
Il peut participer à la réalisation d’un rapport dit « intégré » qui, lui, a pour objectif de présenter la stratégie de l’entreprise de façon globale et la façon dont elle crée de la valeur à long terme.
Un rapport qui rend compte de l’ensemble de l’activité de l’entreprise
Le rapport intégré a vocation à donner autant de place à des informations plus globales - sociales, environnementales, managériales et stratégiques - que financières. Il s’agit de produire un compte rendu complet de l’année écoulée qui reflète l’ensemble de l’activité de l’entreprise. On resitue l’entreprise dans sa globalité, en présentant sa stratégie, le marché dans lequel elle évolue, son contexte concurrentiel, l’analyse des forces-faiblesses-opportunités-menaces, le management, la politique sociale, la démarche RSE, etc.
Objectif : donner des informations sur la véritable situation de l’entreprise. La situation financière, même complétée avec des annexes, ne peut fournir qu’une information partielle. Beaucoup plus qu’une simple démarche de communication sur le développement durable, le rapport intégré est une démarche de preuve et de transparence. En effet, il doit être pertinent, fiable, comparable d’un exercice à l’autre, et englober un périmètre le plus large possible.
Lectures du moment, tribunes d'experts, management et entrepreneuriat...
Vers une utilisation progressive et spontanée du rapport intégré
Le rapport intégré se développe beaucoup au-delà du contexte législatif et réglementaire. L’idée est que toutes les entreprises ont un impact sur leur environnement et sur la société en général. Les pays anglo-saxons l’utilisent, et de plus en plus d’entreprises commencent à s’y mettre spontanément. Elles n’y sont pas contraintes, mais elles s’investissent dans la démarche, notamment celles qui sont déjà engagées dans une démarche RSE.
C’est là sans nul doute un modèle de restitution de l’action des entreprises qui va se généraliser dans les années à venir.
Bien réfléchir sur ses propres critères
Le rapport intégré est un rapport intelligent. Chaque entreprise peut créer son rapport en fonction de sa taille, de son activité, de sa stratégie. C’est une démarche qui doit être construite sur le long terme. Il s’agira donc de commencer à bien définir ses propres critères, en réfléchissant sur la manière dont ils pourront être mesurés et comparables dans le temps.
Il n’existe pas de plan type du rapport intégré, chaque entreprise dispose d’une grande liberté, mais on peut par exemple y faire figurer les informations suivantes : l’historique, les chiffres clés, la vision, les valeurs, les thématiques RSE, le diagramme des parties prenantes, la gouvernance, les lignes de services, tout ce qui concerne le personnel (répartition effectifs, hommes-femmes, etc.), la consommation du papier, la consommation électrique, l’analyse SWOT, quelques tableaux synthétiques sur les finances, les marchés, la concurrence, les priorités stratégiques, les perspectives…
Important : diffuser des informations le plus factuelles possibles. Autant le rapport RSE, qui est présenté en même temps que le rapport de gestion, est public, autant le rapport intégré, qui est volontaire, peut être diffusé au choix de l’entreprise aux parties prenantes qu’elle détermine.
Le rapport intégré, futur standard de l’information financière et extra-financière de toutes les entreprises
Il serait souhaitable que les sociétés consolidées et les SAS soient soumises elles aussi à l’obligation d’émettre un rapport RSE (cf. ci-dessus), afin que, progressivement, toutes les entreprises diffusent ce type d’information. Les fédérations professionnelles travaillent sur le sujet.
Il est par ailleurs évident que le rapport intégré est la forme de communication qui va s’imposer demain pour les PME et les ETI ; avec, enfin, des informations pertinentes et complètes, plutôt que de simples chiffres ne présentant qu’une partie de la réalité de l’entreprise.
Quant aux TPE, établir ce type de rapport, certes simplifié, leur permettrait de s’obliger, chaque année, à réfléchir sur leur stratégie et leur positionnement. Que des bénéfices, en sorte…
*Baker Tilly France, réseau fédéraliste de 36 cabinets indépendants répartis sur l'ensemble du territoire français, y compris les départements d'Outre-Mer (Guadeloupe et Réunion) et dans la plupart des pays francophones d'Afrique (Bénin, Cameroun, Côte d'Ivoire, Gabon, Madagascar, Maroc, Tunisie et Sénégal)
http://www.bakertillyfrance.com/fr
Comprendre l'économie durable pour s'y investir