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Le cash, une espèce en voie de disparition,...

… ou peut-il faire de la résistance ?


Tribune de Frantz Waze, Directeur administratif et financier de Banque Travelex

Dans un monde envahi par le digital, pièces et billets font de la résistance. Malgré les nombreux acteurs, privés comme publics, partisans d’une société sans cash, tous les consommateurs ne sont pas prêts à sauter le pas. L’argent liquide a finalement encore de beaux jours devant lui.

Oublier l'argent liquide : c’est le pari que s’est lancé la Suède depuis quelques années pour lutter contre la fraude et faire des économies. Dans le pays scandinave, les distributeurs de billets se font rares, les commerçants refusent les paiements en espèces et même les horodateurs peuvent se régler sans monnaie. Résultat : les Suédois utilisent aujourd’hui leur carte bancaire pour plus de 80 % de leurs achats. A l’occasion du Forum mondial de Davos en 2016, John Cryan, aux commandes de Deutsche Bank, n’a pas peur de le dire : « le cash, je pense, n'existera probablement plus dans 10 ans. Ce n'est pas quelque chose qui est nécessaire, c'est terriblement inefficace et cher ». Mais ce discours rappelle celui de la mort du chèque, annoncée déjà depuis plusieurs décennies. Et pourtant, les Français font encore en moyenne plus de 2 chèques par mois. Le cash, lui aussi, risque de faire de la résistance.

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Une mort programmée par les banques et les gouvernements

A l’instar de John Cryan, les grandes banques militent pour faire disparaitre l’argent liquide de la circulation. Au-delà des risques de fraude, la gestion des espèces coûte cher, très cher. Depuis la fin des années 1980, les distributeurs automatiques (DAB) se sont multipliés à travers tout l’hexagone. Face à 57 000 DAB coûteux à approvisionner et à entretenir, les banques françaises commencent aujourd’hui à faire machine arrière. Pour Philippe Herlin, économiste spécialiste des moyens de paiement et auteur de « La Fin des banques », « elles ont intérêt à faire diminuer le poids des espèces car ça leur coûte cher (de l'ordre de 2,6 Mds€ par an) et ne leur rapporte rien ». Notamment face aux petits commerçants défenseurs traditionnels du cash, l’un des moyens reste de les encourager à abandonner son utilisation grâce à l’allègement des fameuses CIP (commissions interbancaires de paiement) sur les faibles montants.

Les Etats, eux aussi, rêvent de la fin de l’argent liquide. A la suite de la crise financière de 2008, dans un pays où le cash était roi, le gouvernement grec a imposé une limite de montant des retraits hebdomadaires et obligé les commerçants à s’équiper de terminaux de paiements électroniques. Quant à la BCE, avec l’arrêt de l’émission des billets de 500€ d’ici fin 2018, elle affiche sa volonté de lutter contre le crime organisé. En France enfin, il est désormais interdit depuis le 1er septembre 2015 de payer en liquide des achats de plus de 1 000€, un plafond fixé auparavant à 3 000€.


Le village gaulois des particuliers résiste encore et toujours

Et pourtant, le cash n’a pas encore dit son dernier mot. Et ce, grâce aux particuliers, dont les habitudes en termes de moyens de paiement ont la dent dure, même si plus d'un tiers des Européens et des Américains se déclareraient heureux de se passer d'argent liquide. D’après une enquête IFOP de 2016, les Français préfèrent encore la monnaie sonnante et trébuchante pour 1 achat sur 2. Ils en apprécient particulièrement la facilité d’usage, la pérennité et la sécurité. Anxieux à l’égard des fraudes à la carte bancaire, les consommateurs jugent en effet le liquide comme le moyen de paiement le moins risqué. Et surtout, le billet reste le symbole d’une identité, qu’elle soit régionale, nationale ou européenne, mais aussi d’une liberté puisqu’il s’agit encore du seul moyen de paiement gratuit pour celui qui l’utilise.

Par ailleurs, certains pays sont culturellement attachés au cash, comme l’Allemagne : à l’occasion de l’annonce de la fin des billets de 500€, le quotidien régional Reinische Post défendait « Le cash, c'est la liberté » tandis que le quotidien populaire allemand Bild arguait « Touche pas à mon liquide ». De même, certains pays africains et sud-américains privilégient l’usage de l’argent liquide dans un environnement de faible bancarisation, mais aussi le paiement mobile, marché dopé par les succès d’acteurs comme Orange ou M-Pesa.


La carte bancaire, bientôt rayée de la liste

Sur le vieux continent, la pression technologique et l’émergence de nouveaux acteurs comme les Fintech incitent à d’autres pratiques de paiement. Les banques mobiles Revolut et N26 font ainsi trembler les établissements traditionnels, tandis que la jeune française Lydia se hisse parmi les applications de paiement mobile les plus performantes actuellement. Les Gafa, eux aussi, se sont très tôt engouffrés sur le créneau en lançant, entre autres, Apple Pay et Android Pay. En octobre dernier, c’était au tour de la Banque centrale d’Irlande de donner à Facebook l’agrément de prestataire de paiement et d'émetteur de monnaie électronique. Ces initiatives témoignent du mouvement généralisé de dématérialisation des moyens de paiement, annonçant la fin programmée de la bonne vieille carte bancaire physique. Les réseaux de carte l’ont bien compris, cherchant à se positionner désormais sur le marché du paiement instantané. Visa a ainsi lancé sa solution de transfert d'argent quasi immédiat, Visa Direct, tandis que MasterCard a annoncé son rachat de la startup britannique VocaLink, qui dispose d'une plateforme de paiement instantané. « En 2020, nous espérons que la moitié des transactions Visa se fassent avec un téléphone », déclare Conor Langford, vice-président de Visa Irlande.


A quand l’acte de décès de la carte ?

Alors oui, l’argent liquide est voué, à terme, à disparaître. Mais nul doute qu’il sera encore bien présent le jour du prochain enterrement de la carte bancaire plastique.

www.travelex.fr

 

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