Les prochaines étapes du Brexit et leurs conséquences économiques, une étude fouillée de Knight Frank, conseil international en immobilier
La question de l’après Brexit est prégnante, mais pour l’instant, elle ne peut recevoir qu'une réponse complexe, à multiples tiroirs. Le spécialiste de l’immobilier d’entreprise s’y est pourtant attelé, dans son magazine « Under The Eye ».
La conclusion est que nous tous, Européens et Britanniques, nous effectuons un saut dans l'inconnu. Ce que résume bien le titre de l’étude : « je t'aime, moi non plus… Et ce n’est pas fini ! »
Pour l’instant, la tonalité dominante est le clair-obscur. A cela trois raisons :
- d’abord, l’aspect juridique est incroyablement complexe ;
- ensuite, l’environnement géopolitique est incertain ;
- enfin, il ne faut pas sous-estimer les réactions psychologiques, aussi bien des dirigeants au sommet, que des décideurs économiques sur le terrain.
Comment en est-on arrivé là ? L’Histoire retiendra que la Grande Bretagne aura été le premier pays à demander sa sortie. L’étude Knight Frank dresse une rétrospective historique des positions vis à vis de l’Europe des personnels politiques anglais depuis la Libération. L’euroscepticisme est une posture fréquente. Elle a été partagée aussi bien par les travaillistes que les Conservateurs. Confortée par ce contexte, Theresa May peut fort bien adopter une attitude intransigeante. Et c’est bien ce qui inquiète les entrepreneurs installés à Londres.
Comprendre l'économie durable pour s'y investir
Réactions psychologiques en chaîne. Dernièrement, le patron d’Easyroommate, qui dirige une start-up de l’économie collaborative, exprimait fort bien ce ressenti largement partagé. Depuis Londres, son entreprise gère ses activités dans une vingtaine de pays avec des salariés d’une douzaine de nationalités. « Qu’un tel mode d’organisation soit possible, expliquait-il, c’est précisément ce qui a fait la force de Londres jusqu’à maintenant. Si les restrictions à cause du Brexit se confirment, c’est un problème pour nous ».
Dans le même état d’esprit, la banqueHSBC a récemment indiqué qu’elle allait déplacer un millier de postes de la capitale britannique vers Paris, soit l’équivalent de 20% du CA réalisé par la branche d’investissements à Londres. Goldman Sachs pourrait faire de même, en direction de Francfort. A la mi-février, le patronat britannique a pointé la difficulté de plus en plus grande de recruter des ressortissants européens, alors que ceux-ci sont essentiels à l’activité de nombreux secteurs, qui seront amenés à revoir rapidement leur politique de recrutement et, sans doute, à augmenter les salaires. Ou à changer de modèle économique.
De leur côté, les prestigieuses universités britanniques déplorent une baisse de 7% des inscriptions d’étudiants étrangers depuis le référendum. Celle d’Oxford, qui a embauché un chef de la stratégie post-Brexit, réfléchit à délocaliser une partie de ses cursus et diplômes à Paris.
Un rôle financier international maintenu
Cependant, le savoir-faire de Londres en matière de finance et d’assurance ne s’effacera pas d’un coup. La City a de grandes chances de demeurer le centre financier dominant en Europe. Il y aura des départs de services et de compétences mais sans doute pas d’exode massif. A titre d’exemple, 80% du CA du secteur bancaire britannique est indépendant du droit au « passeport financier. Côté assureurs, ce sont 72% des exportations de produits qui se font sans lui, tandis que 79% des actifs sous gestion au Royaume-Uni sont liés à des clients extérieurs à l’UE. La Financial Conduct Authority (FCA), le régulateur financier britannique, estime que 5 500 entreprises enregistrées au Royaume-Uni font usage de 336 000 passeports financiers différents.
En attendant d’y voir plus clair, la situation oblige à s’accoutumer au brouillard londonien !