Joël Reuland, gérant de la gamme de fonds patrimoniaux BL-Global fait le point, en 10 questions/réponses, sur la stratégie de gestion du fonds BL-Global 50.
Dans quels types d’actifs le fonds est-il investi ?
JR : Le BL-Global 50 est investi à hauteur de 35 à 65% en actions, le solde étant placé en obligations, liquidités ou métaux précieux. Le portefeuille actions du fonds investit à l’échelle mondiale dans des entreprises de qualité affichant un avantage compétitif durable. La partie obligataire investit exclusivement dans des obligations d’Etat. L’exposition aux métaux précieux sert principalement d’assurance contre le risque systémique.
Quelle est la stratégie de gestion adoptée ?
JR : Pour nous, le métier de gérant consiste essentiellement à éviter les erreurs. Ceci s’explique par le fait qu’un investissement qui perd 50% doit doubler pour revenir à l’équilibre. Le caractère asymétrique des pertes et profits explique notre aversion au risque, quitte à rater les gains extraordinaires. C’est en évitant les pertes que nous visons à faire croître le patrimoine dans la durée. Pour cette raison, nous investissons uniquement dans ce que nous comprenons et restons à l’écart des domaines que nous ne maîtrisons pas. Ainsi nous n’investissons pas dans les valeurs financières parce qu’elles ne sont pas transparentes, ni dans les sociétés minières dont les résultats dépendent trop de l’évolution des prix des matières premières que nous ne pouvons prévoir. Nous sommes réticents à investir dans des entreprises très cycliques en raison de la difficulté d’anticiper correctement les périodes de récession. En évitant d’investir dans ce que nous ne comprenons pas, nous limitons le nombre d’erreurs.
Quels sont vos autres moyens pour réduire les risques dans le portefeuille ?
JR : Pour tout investissement envisagé, nous calculons une valeur intrinsèque. Dans le cas des actions, elle est établie sur base de notre estimation du cash-flow récurrent de l’entreprise. Afin de réduire la probabilité de pertes, nous investissons lorsque le cours de bourse offre une décote par rapport à la valeur intrinsèque. Si nous nous trompons sur la thèse d’investissement, la perte encourue sera atténuée.
Avec autant de prudence, à quel moment êtes-vous prêt à prendre davantage de risques ?
JR : Nous prenons plus de risques lorsque les décotes de valorisation le suggèrent. Psychologiquement cela n’est pas toujours facile parce que les décotes deviennent élevées pendant les périodes de stress intense sur les marchés. C’est à ce moment-là que les opportunités se présentent, comme ce fut le cas fin 2008 ou début 2009. Et comme nous sélectionnons des actions de qualité, la faiblesse de leurs cours de bourse lors des périodes de crise n’est guère pérenne. Une fois le stress passé, nous redevenons plus prudents. Cela nous empêche généralement de profiter au maximum des moments d’euphorie boursière. Mais c’est le prix à payer pour éviter les chutes importantes. Et sur l’ensemble d’un cycle économique, cela rapporte. Ce que nous ne perdons pas lors des moments de baisse fait plus que compenser ce que nous ne gagnons pas pendant les phases euphoriques. Pertes et profits sont bel et bien asymétriques…
Lorsque vous êtes peu investis en actions, vous misez sur les obligations ?
JR : En partie oui. Néanmoins nous nous limitons aux obligations d’Etat. Nous ne prenons pas de risque entreprise dans la partie obligataire, qui est censée stabiliser le portefeuille en période de stress sur les marchés boursiers. Compte tenu des niveaux d’endettement élevés à travers le monde, nous limitons actuellement le risque de crédit à l’Allemagne et aux Etats-Unis.
Et pourtant, les rendements à échéance des emprunts d’Etat allemand sont négatifs même sur les échéances longues...
JR : Il est clair que les obligations n’ont plus les mêmes attraits qu’elles avaient au cours des 25 dernières années. Ceci dit, mêmes avec des rendements à échéance négatifs, les obligations peuvent continuer à s’apprécier si les rendements deviennent encore plus négatifs. Cela paraît absurde, mais c’est la conséquence de la politique de taux négatif pratiquée par Mario Draghi. Et si la BCE baisse ses taux d’intérêts encore davantage, à -2 ou -3% pour « forcer » les ménages à consommer leur épargne, les cours des obligations d’Etat continueront à monter. A terme, une telle politique monétaire risque d’être inflationniste, mais entre-temps les obligations s’apprécient. Pour cette raison, nous restons investis en obligations allemandes malgré les rendements à échéance négatifs. Nous nous limitons toutefois aux échéances 2017 à 2020, en raison des risques inflationnistes d’une telle politique sur le long terme.
Aux Etats-Unis, les rendements à échéance demeurent positifs
JR : En termes relatifs, les bons du Trésor américain sont attrayants. C’est pourquoi les obligations américaines que nous détenons ont des échéances plus longues que les obligations allemandes. Néanmoins, nous restons vigilants. En raison de la dette élevée, la probabilité d’une politique volontairement inflationniste des banques centrales pour réduire les ratios d’endettement publics est en train d’augmenter. On n’y est pas encore, mais on semble s’en rapprocher. C’est pourquoi des obligations à échéance longue sont nettement plus risquées.
Compte tenu du faible attrait des obligations, y a-t-il une alternative de diversification ?
JR : L’or est définitivement une option. Plus les politiques monétaires des banques centrales deviennent insensées, plus l’or a sa raison d’être dans les portefeuilles. La principale raison pour laquelle l’or n’a pas monté davantage jusqu’à présent malgré les politiques d’assouplissement monétaire quantitatif des banques centrales tient au fait que ces politiques n’ont pas créé d’inflation. Mais la faiblesse de l’inflation ne surprend pas, si on comprend la technique de l’assouplissement monétaire quantitatif. Si, par contre, les banques centrales changent de stratégie et veulent créer volontairement de l’inflation, elles y aboutiront. Et à ce moment-là, le prix de l’or va réagir. Et puis, on ne sait jamais. Si les investisseurs perdent confiance dans les stratégies insensées des banques centrales, une exposition à la monnaie ultime que, contrairement aux monnaies papier, on ne peut imprimer à volonté, pourrait s’avérer judicieuse.
A quoi peut-on s’attendre en tant qu’investisseur dans le BL-Global 50 ?
JR : Depuis le lancement du fonds en octobre 1993, le BL-Global 50 a généré un rendement de 4,5% par an. Néanmoins, ce rendement historique ne peut pas être considéré comme représentatif pour le futur étant donné que les conditions de marché ont complètement changé. En raison des politiques monétaires non conventionnelles des banques centrales, les placements monétaires et obligataires n’offrent presque plus de rendement. Tout dépend dès lors des actions, qui compte tenu de l’ampleur des déséquilibres économiques, devraient se traiter à des niveaux de valorisation plus bas. Protéger le pouvoir d’achat sans subir une volatilité trop importante est devenu le mot d’ordre pour les années à venir. Cela peut paraître peu ambitieux comme objectif, mais compte tenu des rendements nuls voire négatifs sur les placements monétaires et obligataires, la protection du pouvoir d’achat prend une signification tout à fait nouvelle.
http://www.banquedeluxembourg.com/
Comprendre l'économie durable pour s'y investir