La loi de finances pour 2013 et la loi de finances rectificative pour 2012 ont été publiées au journal officiel le 30 décembre amputées des articles censurées par le Conseil constitutionnel.
1) Dans ses décisions du 29 décembre, le Conseil constitutionnel a notamment censuré l'article 12 du projet de loi de finances instaurant une contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus d'activité. Cette contribution, dont le taux devait être de 18%, aurait conduit à imposer à 75% les revenus d'activité 2012 et 2013 supérieurs à 1M€.
Le Conseil constitutionnel a considéré qu'en prévoyant d'imposer les revenus supérieurs à 1M€ par personne physique et non par foyer fiscal ce texte méconnaissait le principe d'égalité devant les charges publiques.
Le gouvernement a annoncé qu'il proposerait en 2013 un nouveau dispositif tenant compte des griefs du Conseil constitutionnel. Cela étant ce nouveau dispositif ne pourra pas concerner les revenus 2012 qui échappent donc à l'imposition à 75%.
2) Le Conseil constitutionnel a également censuré la suppression rétroactive du prélèvement libératoire sur les dividendes et les intérêts 2012. Les prélèvements libératoires sur les dividendes et sur les intérêts sont bien supprimés mais uniquement à compter du 1er janvier 2013.
Pour les dividendes et les intérêts 2012, les dispositions du projet de loi de finances qui transformaient le prélèvement libératoire payé en 2012 en un simple acompte ont été censurées. Le Conseil constitutionnel a considéré que le législateur ne pouvait pas rétroactivement supprimer le caractère libératoire de ces impositions.
Les contribuables ayant perçu des dividendes et/ou des intérêts en 2012 soumis au prélèvement libératoire n'auront donc pas d'impôt sur le revenu complémentaire à acquitter en 2013 au titre des ces revenus. (Précisons toutefois que lesdits revenus entrent dans l'assiette de calcul de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de 3% et 4%).
3) S'agissant de l'ISF, le Conseil constitutionnel a censuré le paragraphe de l'article 13 du projet de loi de finances qui prévoyait d'intégrer dans les revenus à prendre en compte pour le calcul du plafonnement certains revenus latents.
L'ISF 2013 sera donc calculé selon un nouveau barème progressif à 6 tranches. Le montant de l'impôt résultant du barème sera ensuite plafonné de telle sorte que la somme de l'ISF et de l'impôt sur le revenu n'excède pas 75% des revenus réalisés en 2012. Ce plafonnement s'appliquera sans limitation. Dès lors, un redevable qui n'aurait eu aucun revenu en 2012 ne devrait, par l'effet du plafonnement, avoir aucun ISF à régler en 2013.
Il n'est pas exclu qu'en 2013 le gouvernement modifie les règles de calcul du plafonnement en ré-instaurant, par exemple, un plafonnement du plafonnement. Toutefois, ces modifications, si elles intervenaient, ne devraient pas concerner l'ISF 2013.
4) Toujours concernant l'ISF, le Conseil constitutionnel a également censuré le paragraphe de l'article 13 prévoyant qu'un redevable détenteur de droits sociaux exonérés au titre des biens professionnels devrait intégrer dans sa déclaration d'ISF les éventuels biens non nécessaires à l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale figurant au bilan de la société.
Compte tenu de cette censure, la rédaction de l'article 885 O ter demeure inchangée. En cas de présence au bilan de biens non nécessaires à l'activité de l'entreprise, le redevable qui bénéficie de l'exonération au titre des biens professionnels devra continuer à déclarer ses droits sociaux à proportion de la valeur que représente lesdits biens.
5) Le Conseil constitutionnel a également censuré le relèvement de la contribution salariale sur les gains de stocks options et d'actions gratuites attribuées à compter du 28 septembre 2012.
Compte tenu de cette censure partielle de l'article 73 du projet de loi de finances, les gains de stocks options et d'actions gratuites attribués à compter du 28 septembre 2012 resteront soumis à une contribution salariale au taux de 10% et non comme prévu par le projet de loi de finances au taux de 17.5% (voire 22.5% en cas de non respect d'un délai d'indisponibilité).
Rappelons que par ailleurs la loi de finances soumet les gains de stocks options et d'actions gratuites résultant d'options ou d'actions attribuées depuis le 28 septembre 2012 au barème de l'impôt sur le revenu (et non plus à une imposition forfaitaire) et à la CSG (7.5%) et à la CRDS (0.5%) sur les revenus d'activités (et non plus aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine qui s'élèvent globalement à 15.5%).
Dès lors, pour un contribuable imposé dans la tranche marginale de l'impôt sur le revenu (45%), le taux effectif d'imposition des gains de stocks options et d'actions gratuites sera, compte tenu d'une quote-part de CSG déductible de 5.1%, de 60.7% hors contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et pourra atteindre marginalement 64.5% compte tenu de cette contribution.
6) Le Conseil constitutionnel a également censuré l'article 15 du projet de loi de finances qui modifiait le régime d'imposition des plus-values immobilières.
Rappelons que l'article 15 prévoyait d'une part un régime d'imposition spécifique pour les plus-values immobilières résultant de cessions de terrains à bâtir et prévoyait d'autre part un abattement exceptionnel de 20% sur les plus-values immobilières réalisées en 2013 au titre de la cession de biens autres que des terrains à bâtir.
7) S'agissant du plafonnement de certains avantages fiscaux, le Conseil constitutionnel censure le maintien d'un plafonnement proportionnel au revenu imposable du contribuable pour les investissements outre-mer et les SOFICA.
Le projet de loi de finances prévoyait de maintenir un plafond de 18 000 € +4 % du revenu imposable pour les investissements outre-mer et les SOFICA. Compte tenu de la censure du Conseil constitutionnel, l'avantage en impôt maximal susceptible d'être procuré par ces dispositifs sera donc plafonné en 2013 à 18 000€ quel que soit le revenu du contribuable.
Il convient d'avoir à l'esprit que ce plafond ne se cumule pas avec le plafond de 10 000 € applicable à certains autres dispositifs de réductions, déductions ou crédits d'impôt. Ainsi un contribuable qui bénéficiera au titre de l'imposition des revenus 2013 d'une réduction d'impôt de 7 500 € pour emploi d'un salarié à domicile pourra au maximum réduire son impôt de 10 500 € par un investissement outre-mer de sorte que le total des deux avantages n'excède pas 18 000 €.
8) Enfin, le Conseil constitutionnel a censuré l'article 19 du projet de loi de finances rectificative qui prévoyait qu'en présence d'une donation de titres suivie d'une cession par le donataire moins de 18 mois après la donation, le donataire serait imposé sur la plus-value réalisée par le donateur.
Le Conseil constitutionnel considère que ce texte aurait fait peser sur le donataire une imposition supplémentaire sans lien avec sa situation puisque liée à l'enrichissement du donateur.
Compte tenu de cette censure une donation de titres continuera donc à effacer la plus-value réalisée par le donateur.
Stéphane Jacquin, Directeur de l'Ingénierie Patrimoniale de Lazard Frères Gestion