Extrait du commentaire de Luisa Florez, Head of Qualitative ESG Research chez AXA IM et Laurence Devivier, Senior RI Economist.
La signature d’un accord sur la lutte contre le changement climatique (Accord de Paris), notamment par les principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre (Chine et États-Unis), démontre une prise de conscience à l’échelle mondiale, du risque à long terme du changement climatique sur l’environnement et nos économies. On peut raisonnablement s’attendre à une ratification de l’accord le 22 avril 2016, car le sujet a engendré un large consensus notamment avec la Chine responsable de plus de 27% du total des émissions.
Conséquences pour les investisseurs
Alors qu’en 2015, la priorité était le désengagement des activités émettrices de carbone, nous attendons un changement d’orientation pour 2016 : les investisseurs vont s’intéresser aux nouvelles opportunités d’investissement et à leurs répercussions en matière de gouvernance. Selon nous, les trois thèmes suivants exerceront une influence sur les décisions d’investissement.
1/ La signature de l’accord envoie un message clair aux sociétés productrices d’énergie, de transport et de construction de bâtiments et à l’industrie : un changement est nécessaire. Nous pensons que cela n’aura aucun impact immédiat sur les prix ou l’allocation des actifs, mais plutôt que les analystes et les investisseurs intégreront cet aspect dans la recherche, et analyse fondamentale, afin d’évaluer la façon dont les entreprises répondent à ce nouvel environnement.
2/ Opportunités de financement de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Les investisseurs publics et privés joueront un rôle clé dans l’apport de capitaux pour les investissements dans les nouvelles technologies favorisant les économies d’énergie ou l’apparition de nouvelles sources d’énergie. En partant de l’hypothèse que les populations maintiendront le même niveau de consommation d’énergie, les investissements chercheront à réduire l’intensité de carbone des sources actuelles ou à les remplacer par de nouvelles.
L’opportunité est vaste et touchera de nombreux secteurs, régions et classes d’actifs. Par exemple, les énergies renouvelables telles que l’énergie éolienne nécessiteront des investissements en infrastructures et des solutions innovantes en matière de stockage et de transport. Auparavant, ces opportunités dépendaient de subventions publiques. Or, le nouvel accord rend l’appui plus explicite et fait appel aux investisseurs de tous les secteurs pour mettre en œuvre cette transition au rythme souhaité.
3/ Une plus forte mobilisation et des normes de gouvernance plus strictes. Le Conseil de stabilité financière (FSB), mis en place après la crise afin de surveiller et d’évaluer les vulnérabilités du système financier mondial, incitera les entreprises à déclarer leurs risques liés au climat. Cette politique renforcera la transparence pour les investisseurs, ce qui sera favorable à l’analyse fondamentale et rendra l’évaluation et la notation ESG plus fiables. Le mouvement en faveur de la publication de ce type d’informations a été lancé avant la COP21 grâce à la mobilisation des investisseurs, mais la décision du FSB rend ces mesures plus concrètes.
Il est intéressant de noter que le gouvernement français a adopté une nouvelle réglementation unique en son genre qui oblige les investisseurs institutionnels à prendre leurs décisions d’investissement en fonction du scénario du réchauffement climatique limité à 2°C.
Si les directives sont générales, des exemples de meilleures pratiques devraient surgir au cours des 2 prochaines années et influencer les méthodes de reporting. La France est le seul pays à établir un lien direct avec les investisseurs, mais les investisseurs d’autres pays seront probablement très attentifs aux implications de cette réglementation en ce qui concerne le reporting, la gouvernance et les investissements.
Comprendre l'économie durable pour s'y investir