Par Christopher Chu, Gérant de portefeuille Asie chez UBP
Depuis le début de l’année, l’attention des investisseurs s’est essentiellement focalisée sur deux questions: la date de la première hausse de taux de la Fed et le rythme de décélération de l’économie chinoise. Ces deux aspects sont non seulement considérés comme hautement critiques, vu leur impact sur les coûts d’emprunt mondiaux, mais ils jouent également un rôle de moteur de l’activité globale. Les réunions des principales banques centrales qui ont eu lieu fin octobre - dans les pays développés et émergents - consolident une grande partie des anticipations générées cet été.
Les réunions des principales banques centrales qui se sont tenues la dernière semaine d’octobre ont de nombreuses implications et soulèvent de nouvelles questions. Si la Réserve fédérale américaine a décidé de différer sa hausse de taux, Janet Yellen a néanmoins affirmé que la situation économique restait propice à une probable hausse de taux en décembre, reflétant ainsi un changement de ton par rapport à la réunion de septembre.
La Banque centrale de Chine souhaite soutenir durablement la croissance et libéraliser les marchés financiers
De son côté, la banque centrale de Chine (PBoC) a réduit ses taux d’intérêt, soit sa 6e baisse de taux depuis novembre 2014. L’accent a été maintenu sur la croissance, l’ambition de la Chine étant de multiplier son PIB par deux pour la période de 2010 à 2020, soit, au final, un chiffre équivalent à celui des Etats-Unis à l’heure actuelle. Cela suggère un taux de croissance annuel minimum de 6,5%, un objectif réalisable. La réunion monétaire de la PBOC a également souligné l’importance de la libéralisation des marchés financiers et du soutien aux services manufacturiers du pays. La PBoC a annoncé la suppression du plafond sur les taux de dépôt, permettant une concurrence accrue parmi les banques.
Par ailleurs, l’abandon de la politique de l’enfant unique constitue une avancée sociale majeure, dans la mesure où elle permet d’apaiser les inquiétudes sur la population vieillissante du pays. Néanmoins, la préférence traditionnelle des parents pour les garçons ainsi que le déséquilibre du ratio des sexes - avec 120 garçons pour 100 filles - pèsent sur la stabilité sociale. Enfin, les implications économiques de cette mesure sont aujourd’hui limitées, puisque Pékin avait déjà autorisé les couples à avoir deux enfants à condition que l’un des deux conjoints soit lui-même un enfant unique.
En décembre, la Fed pourrait opter pour un relèvement minimal de ses taux, de l’ordre de 12,5 à 25 points de base
L’heure est donc à la divergence des politiques monétaires des deux plus grandes économies mondiales, avec, d’un côté, les Etats-Unis qui annoncent un resserrement et, de l’autre, la Chine qui préfère, elle, un assouplissement. En réalité, les deux nations reconnaissent toutefois que l’environnement mondial actuel est rigide et qu’il n’est pas en mesure de faire face à de puissantes forces contraires.
Selon notre scénario central, une hausse des taux de la Fed en décembre reste une possibilité. La Fed a en effet besoin de redorer sa crédibilité, celle-ci s’étant sensiblement dégradée cet été. Plus spécifiquement, l’une des solutions possibles serait que la Fed opère un resserrement en relevant uniquement la limite inférieure de la fourchette de taux directeurs, laquelle passerait donc de 0,0-0,25% à 0,125-0,25%.
Ainsi, Mme Yellen maintient l’éventualité d’une politique de resserrement durant l’année calendaire 2015 tout en évitant un impact significatif sur les coûts d’emprunt. Cela permettrait également à la présidente de la Fed de laisser entrevoir un processus de resserrement plus faible que pour les cycles précédents, à l’heure où un USD plus fort agit à lui seul comme un mécanisme de resserrement monétaire.
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