Le point de vue de Norbert Fanchon, Président du Directoire du Groupe Gambetta*,
On pourrait parler de poudre aux yeux. On dira plus courtoisement que la dernière mesure prise par la ministre du Logement, de l'Egalité des Territoires et de la Ruralité - matérialisée par un décret paru le 26 juin dernier - est optique : elle a l'allure d'une mesure forte, mais en réalité elle sera sans efficacité. De quoi s'agit-il ?
Un fonds doté de 100 M€ est créé pour soutenir les communes actives en matière de construction résidentielle.
Dans le détail, l'aide s'élève à 2 000€ par logement construit au-delà du taux de croissance normal du parc, statistiquement de 1% en moyenne nationale. Elle ne concerne que les communes situées en zones tendues dans lesquelles le potentiel financier par habitant n'excède pas 1 030€, à l'exclusion de celles dont le parc a une proportion de logements sociaux inférieure aux 25% légaux.
Seulement voilà, le remède n'est pas à la mesure du mal, il est mal administré et sa puissance est insuffisante : n'importe quel maire sait que le coût par logement de ce qui devra accompagner la construction d'un programme est bien plus élevé que l'enveloppe offerte par la mesure.
D'autre part, ne pas ouvrir le droit à l'aide aux communes dites "carencées" sera contre-productif : par définition, elles sont celles qui ont le plus grand besoin d'encouragement, et le gouvernement les désigne à la vindicte plutôt que de les aider à mieux faire.
Surtout, la logique profonde de l'aide, certes conçue sur le fondement d'une bonne intention, a de quoi choquer. Elle fait penser à ces cadeaux que des parents croient opportun de promettre à leurs enfants sous condition qu'ils travaillent bien à l'école.
De façon symétrique, produire des logements en France est nécessaire, alors que le nombre d'autorisations de construire continue sa descente aux enfers et qu'il est d'une urgence vitale d'inverser la tendance.
Il serait plus conforme aux enjeux et plus digne de démontrer aux maires qui ne le réalisent pas que construire rapporte des recettes de taxes foncières et d'habitation majorées. Qu'accueillir plus de familles génère une activité économique vertueuse pour les commerces, et prioritairement les commerces de proximité, créateurs de richesse et d'emplois localisés. D'ailleurs, des maires ruraux ont l'audace de dynamiser la construction sur leur territoire pour attirer les entreprises.
La construction résidentielle est le principal ressort de l'aménagement du territoire. Enfin, dans les zones tendues, la rareté de logements ou seulement l'insuffisance entraîne ceux qui y travaillent à aller en périphérie, voire plus loin, conduisant des villes significatives à fermer des écoles ou à supprimer des services publics locaux.
Il faut passer d'une politique sans souffle, curative, à un véritable élan imprimé par le gouvernement, entraînant les collectivités locales. Un pacte de construction vaudrait mieux que toutes les aides, qui affaiblissent le budget global du logement sans résoudre le problème de fond.
* Le Groupe Gambetta, pionnier du logement coopératif, est un promoteur spécialiste de l’accession à la propriété sociale. Basée à Cholet, la société mère (holding), est une coopérative HLM dont l’actionnariat de référence est composé des salariés.
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